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Les Liberterres de Jean-Christophe Lamy

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Vous savez combien j'apprécie les préconisations des bibliothécaires qui nous conduisent vers des découvertes inattendues. Après 99 homes qui concernait la propriété urbaine, c'est maintenant un film sur la ruralité que l'équipe d'Antony (92) a mis en avant, en invitant les réalisateurs à un débat après la projection.

Les Liberterres retrace des parcours professionnels d'agriculteurs qui revendiquent la liberté d’action tout en se rebellant contre le système imposé par l'industrie agro-alimentaire, à l’instar des libertaires qui prônent une liberté absolue fondée sur la négation du principe d'autorité dans l'organisation sociale et le refus de toute contrainte découlant des institutions fondées sur ce principe.

Le réalisateur a suivi les initiatives militantes de quatre paysans à travers l'Europe et l'Afrique qui ont tourné le dos, définitivement, aux méthodes de l’agriculture conventionnelle, avec passion pour la terre et pour la liberté de la cultiver en la respectant sans l'appauvrir et avec une rentabilité très satisfaisante. D'où cet intitulé de liberterre qui est fort à propos.

Les images alternent avec les entretiens tout au long de quatre saisons en entrecroisant des discours de personnages émouvants et provocants, qui ont un point commun : il est possible de travailler autrement que sous le diktat de la pétrochimie ... sans pour autant renoncer à la rentabilité. Celle-ci n’est pas une utopie. L'agriculture biologique est un bienfait pour le paysan, pour le consommateur et pour la terre. Elle est indispensable quand on pense que nous serons 9 milliards en 2050 et que e nourrir deviendra difficile puisque déjà aujourd’hui 1 milliard d’êtres humains souffrent de la faim et de la malnutrition. Bien davantage n’ont pas accès à l’eau potable. Par exemple au Mexique où l’eau du robinet est impropre à la consommation.

Jean-Christophe Lamy a commencé le film en 2008 avec pour objectif de donner la parole sans intervenir lui-même. Il a tourné une séquence puis une autre, au fur et à mesure qu’il gagnait des financements et a terminé en 2014. Depuis sa sortie, fin 2015, les Liberterres tournent dans de nombreux festivals et ont déjà reçu de nombreuses récompenses comme le site dédié le retrace.

Il faut rappeler que l’expression agriculture biologique est née en 1975. Autrefois elle n’était pas nécessaire puisque tout était bio par la force des choses.

Les premières images illustrent des paysages de campagne comme on les voit encore dans les livres d’écoliers : un champ de blé, des prairies. Les saisons se suivent. Apparaissent des visages, tous sérieux, et déterminés. Ce sont les quatre personnages principaux, dont la voix s’élève avec force, en off, forçant le spectateur à l’écouter tandis que sur l’écran la table est dressée en pleine nature.

Chacun savoure sa spécialité, saucisson, pain ou fromage réalisé avec ce qu’il produit. Olga, Giuseppe, Rémi et André vont démontrer qu’il est possible de faire vivre leur famille en cultivant la terre ou en élevant des animaux en suivant un modèle économique qui n’est pas spéculatif. Et les réalisateurs démontrent que produire localement est une réponse qualitative au problème mondial de la famine.

Je vous invite à visionner la bande-annonce pour vous convaincre :


Giuseppe Li Rosi est établi en Sicile. Producteur de variétés de blé anciennes en biologique, il s'est élevé contre les manipulations génétiques du blé et la pression de l’industrie semencière en Italie. Ici, quand je réduis les quantités pour obtenir plus de qualité, les gens me prennent pour un fou ! Il a dénoncé qu’il faille acheter les semences 80% plus cher si on voulait faire pousser des variétés anciennes. Et le combat a été gagné. On espère que d'autres pays pourront obtenir la même chose.

Olga Voglauer habite en Autriche, à la frontière slovène. Le lait de ses vaches est vendu en filière courte. Elle refuse d’agrandir son cheptel et de dépendre des banques : la "décroissance heureuse", chez elle, est tout sauf une utopie. J’ai toujours dit à mon père que je ne voulais pas être l’esclave du lobby agricole. Elle souligne une des aberrations de notre système puisqu'il faut payer pour obtenir la certification bio alors que la logique voudrait que ce soit ceux qui emploient des produits chimiques qui soient être mis à l’amende. La réglementation cautionne de fait une agriculture qu'on pourrait qualifier d'industrielle alors que le circuit court et local est une réponse économiquement favorable.

André Grevisse est agriculteur et éleveur en Wallonie. On le voit à coté de sa mère confier à la caméra que vouloir rester agriculteur comme ses parents était autrefois perçu comme un manque d’ambition, alors que c'est un noble métier. Il était éleveur de vaches Blanc-Bleu Belge,  une race à viande de bêtes à concours. Il raconte que sa prise de conscience s'est faite lorsqu'il s'est vu passer son temps un thermomètre dans une main, la seringue dans l’autre, sans plus avoir le temps de vivre. Le taux de césarienne était de 100 sur 120 avec un coup moyen de 7000 francs par veau en vétérinaire et traitements. Il est passé au bio, a changé de race en préférant l’Angus, plus résistant et de plus de bien meilleure viande.

Remarquant que le liseron et la menthe étouffent les céréales, et ne trouvant pas de molécule (traitement) pour les éradiquer il comprend que la nature se rebelle et abandonne les engrais. C'est en quelque sorte une chance que la chimie ne lui ait pas fourni de solution. On n'a pas besoin de roundup (désherbant). On s’en occupe mécaniquement dit-il avec fierté. On doit être libre. Il montre à la caméra combien la terre est redevenue souple et douce comme du sable en l'espace de quatre ans parce que les vers de terre ont réussi à remuer toute la couche de terre arable. Les racines n’auront aucun mal à y descendre.

Depuis vingt ans il mène une guerre ouverte contre l'agriculture conventionnelle. L’humus n’a plus de secret pour lui. Moi, je suis persuadé que la conventionnelle ne pourra pas nourrir le monde. La preuve : il y a des gens qui meurent de faim partout aujourd’hui ! 

Remi Schiffeleers est éleveur de chèvres en Flandre belge. Il forme aussi de jeunes agriculteurs africains aux méthodes d’élevage et d’agriculture durables. Pour moi, le bio est trop blanc. C’est pour les gens qui ont assez de pognon, les gens d'ici, en Europe.

Remi œuvre dans le mouvement Paysans sans frontières depuis plus de 10 ans, prônant la solidarité, et non la charité. L’Afrique subit de plein fouet le changement climatique, la surpopulation et le déficit alimentaire. La pratique du nomadisme est une catastrophe écologique, et politique, car l’arrivée des troupeaux en quête de nourriture peut suffire pour déclencher une guerre pour peu que les chèvres broutent de l'autre coté de la frontière (invisible sur le terrain), ce qui est perçu comme un envahissement par les voisins.

Il démontre qu’on peut toutefois élever des chèvres en Afrique, à condition de le faire en stabulation et de leur cueillir le feuillage des acacias, laissant ainsi aux arbres le temps de se régénérer. C'est une manière de lutter contre la déforestation massive quand celle-ci prétend libérer des terres agricoles. De plus laisser les chèvres dans l’étable permet de récupérer le fumier toute l’année et d’en nourrir la terre. Car un bon compost se fabrique avec une part d’organique. Le meilleur se compose pour moitié de végétaux et d’animaux. Je me souviens d’un voisin qui avait des melons d’exception parce qu'il amendait son jardin avec du fumier de poule.

Ils sont wallon, sicilien, autrichien mais ils auraient pu tous être français. Beaucoup d’agriculteurs ont compris que l’avenir de leur terre n’était pas dans les engrais et les traitements chimiques. Mais les lobbys de l’industrie agroalimentaire et de la pétrochimie sont ultra puissants pour convaincre du contraire. Ils imposent un modèle encore dominant aujourd’hui. La terre, épuisée, a perdu son humus. On mange de plus en plus mal, et la nourriture n’est pas pour autant accessible à tous.

Ce sont des agriculteurs mais Jean-Chritophe Lamy aurait pu recueillir des propos semblables auprès de viticulteurs ou de cidriers. J'ai discuté avec plusieurs à Cambremer, dans le cadre des rencontres AOC-AOP qui ont le même raisonnement et arrivent aux mêmes conclusions.
Ce documentaire de création est plus qu'un reportage dont il se distingue par son esthétisme. Il a aussi toutes les qualités d'un "film". Il séduit en effet autant par ce qu’il dit que par sa manière de traiter le sujet.

La manière de poser la caméra donne de très belles images. L'oeil du réalisateur a capté des instants élégants comme cette scène, pourtant d'une grande simplicité, montrant un chat perché sur un poteau, évoquant pour moi La pie du tableau de Claude Monet.

Il nous fait aussi remonter le temps, en insérant des archives d'époque, en noir et blanc. Le spectateur est replacé dans le contexte de l'après-guerre alors qu'il était essentiel d'accroitre la production. C'était une époque où on était persuadé que la science allait définitivement sauver le monde de la faim et de la malnutrition. Et c'est quasiment tout le contraire qui s'est produit.

D'autres documentaires ont dénoncé la dureté de la vie des agriculteurs. Par exemple Les fils de la terre d'Edouard Bergeon présenté en 2011 et dont Elise Noiraud a fait une adaptation pour le théâtre. La grande différence avec Les Liberterres est de porter un message très positif. A ce titre il est essentiel.

La croisière ça use

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La croisière ça use est un titre qui fait référence à une série culte, la Croisière s'amuse, créée par Aaron Spelling et diffusée entre 1977 et 1987 sur le réseau ABC. Je ne sais pas si Emmanuelle Hamet a visionné les 249 épisodes pour trouver l'inspiration mais les répliques de la pièce fusent à tout va et de faux semblants en vrais délires, la traversée va virer à la débandade…

Le rideau de scène est bleu pailleté comme la mer. Il se lève sur un décor de cabine de bateau, un peu années 70, semblant encore neuf. Mais à peine parait Antoine (Eric Massot) que les ennuis s’enchainent. Tout se déglingue dans le rafiot et on se demande si c’est bien une bonne idée de vouloir convoyer le Hacouna matata de Tanger à Ibiza pour y faire une (salutaire) révision complète à la demande du propriétaire.

Le skipper ne sera pas tout seul. Il a passé une petite annonce "cherche équipière pour mouillage sauvage". Il se vante d’être cool et naturiste et compte bien passer trois jours de rêve en très bonne compagnie.

La première co-équipière s’appelle Alex, qui se révèle être le diminutif d'Alexandre (Lionel Laget),  et il ne fait pas de doute que c’est un mec. Aussi doué que Gérard Jugnot dans les Bronzés, il dévale l’escalier en chaussures de ski, parce que ça glisse soit-disant mieux que les tongs sur le sable du Maroc. Alex est bien barré, c’est le moins qu’on puisse dire, surtout s’il s’avise de repêcher la came qui pourrait être planquée dans la soute.

Déboule ensuite Joanna (Marie Aline Thomassin). Coup de chance, c’est une femme, mais qui n’a pas pris le temps de se débarrasser de son treillis et qui arrive pour le moins traumatisée du dernier théâtre d’opérations. On pense un instant que c’est une chance d’avoir à bord un adjudant–chef de l’Armée de l’air (même en désertion) pour régler les problèmes techniques de transmission sauf qu’elle commet gaffe sur gaffe. Et pour couronner le tout elle a un tempérament de chienne de garde. Le bel Antoine en sera pour ses frais s’il s’avise de chercher à la séduire.

On est d’accord avec Joanna. On la sent moyen cette croisière surtout sans eau (mais pas sans alcool) et sans vivres. La quatrième passagère est Mélanie (Emilie Marié) pour qui cette croisière relève d'un exercice digne de Koh-lanta. Elle semble avoir un cerveau de la taille d’un poisson rouge même si la belle ne manque pas de répartie pour terminer chacune de ses confidences sur un hastag ponctué de smileys bien pensés. Son unique objectif est d’arriver à Ibiza pour postuler à une émission de télé-réalité, la maison des secrets Ibiza, vu que son secret est (mais je peux pas vous dire qu’elle s’auto-hypnotise sinon c’est plus un secret).

Ces quatre là n’ont pas grand-chose en commun et l’instant apéro ne commence pas sous les meilleurs auspices. Antoine a pourtant conservé une panoplie de gags, du temps où il était GO (non pas géographe comme le pense Mélanie, mais Gentil Organisateur au Club Med, vous savez cette colo pour ultra-riches qui font la queue à 13 heures pour se jeter sur des buffets gratuits). Et la jolie Mélanie va scotcher tout le monde en trouvant en quelques secondes la solution qu’aucune des huiles des villages n’est parvenu à résoudre en dix ans.

Des affinités apparaissent. D’abord la capacité à se déhancher et à camper les vedettes des années 80 à 2000 dans un tourbillon de strass qui va les mettre sur la même longueur d’onde. Leur répertoire est aussi large que la Méditerranée. On entendra Dalida, Brassens, Gainsbourg, Christophe, Liane Foly ...
Ils ont le talent de nous faire rire en combinant toutes les formes possible de comique, qu'il soit de situation ou de mot, comme de geste. On rit sans cesse. Les dialogues fusent sans arrêt. C’est pas un "lui" c’est un "elle" entend-on dire à propos d'Alex.

Les étincelles changent de direction. Ils ne se combattent plus mais surenchérissent pour la bonne cause, la cause du rire. Et chacun se révèle être différent du personnage qu’il incarne. La preuve : j'ai appris que 3 sur 4 comédiens n'ont jamais navigué.

La pièce est écrite par Emmanuelle Hamet et mise en scène par Luq Hamett, qui dirige avec succès le Théâtre Edgar, ... Edgar comme le boulevard Quinet.

La Croisière ça use s'inscrit dans cette tradition et se joue une semaine sur deux à 19h00 et l’autre semaine à 21h00, avec des matinées samedis ou dimanche. Vérifiez les horaires en fonction des dates sur le site du théâtre.
La croisière ça use
Une comédie de Emmanuelle Hamet
Mise en scène Luq Hamett
Avec Eric Massot, Marie-Aline Thomassin, Emilie Marié  et Lionel Laget
58, boulevard Edgar Quinet 75014 Paris
Tel : 01.42.79.97.97
M° Edgar Quinet / Montparnasse / Gaîté

Frédéric Vardon, Aubergiste parisien

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L'éditeur avait choisi le cadre romantique et tout à fait adéquat de la librairie Appétit pour présenter le premier livre labellisé Signature, une nouvelle collection combinant le portrait d'un grand chef, par lui-même, avec ses meilleures recettes.

Frédéric Vardon a baptisé son restaurant le 39 V (prononcer 39-5) situé à Paris, au 39 rue Georges V. Si on lit le V comme le chiffre romain 5 (et comme le V de Georges), on pourrait aussi bien y voir l'initiale de son nom de famille, Vardon, ou celle du prénom de son fils Victor.

Vite couronné d’une étoile, il affiche complet régulièrement. Il faut s’y prendre une semaine à l’avance pour garantir une table, surtout si vous êtes six. Vous pouvez quand même tenter votre chance au dernier moment. Il reste parfois quelques places.

Pas d’enseigne pour indiquer l’entrée du restaurant, ou si petite qu'on reste dans une simplicité digne des plus grands. L'accès se fait discrètement par le 17, rue Quentin Bauchart. Un ascenseur privé permet d'atteindre la salle située au 6 ème et dernier étage d'un immeuble, comme si on avait le privilège d'être invité dans un des nombreux appartements parisiens haussmanniens qui caractérisent ce quartier. On comprendra en lisant le livre pourquoi il ne pouvait se situer qu'en hauteur.

Il répond "cuisine de tradition"à ceux qui lui demandent de définir son style mais ses plats sont tellement travaillés que son art relève de la sophistication. Il aime cuire les viandes blanches. Il adore les fruits et les prépare de manière complexe. Tout est soit-disant simple mais en fait Frédéric Vardon est une énigme et ce livre lève le voile sur son parcours et son talent.

C’est une jolie idée de placer au début de l'ouvrage la photo de la légendaire sonnette de service qui est pour la salle l’équivalent du brigadier qui frappe les trois coups au théâtre. Beaucoup de chefs m'ont dit rétablir ce rituel qui demeure un des fondamentaux des grandes maisons.

Mais que de travail avant de faire résonner le métal. C’est donc en toute logique que Frédéric Vardon a choisi de commencer par des images qui témoignent de la puissance et de la ruralité de ses origines, en l'occurrence normandes, un terroir que je connais bien puisque c'est celui de mon père. Tout (bon) chef se construit sur des racines. Issu d'une famille d'éleveurs et de charcutiers, il est normal que son pâté en croute ait le goût de la viande et du sang.
Il maintient la connexion avec la vie paysanne. En particulier le Pays d'Auge, ce qui légitime sa revendication d'être un aubergiste mais contemporain parce que parisienL'amour de la terre et de la nature se lit dans ses assiettes. Et il offre volontiers sa version de la poularde vallée d'Auge (p. 118).

Ce livre nous apprend que son cursus passe par André Jalbert, l'école Ferrandi, Alain Senderens, Alain Dutournier (comme tant d'autres chefs devenus grands après avoir transité par le Trou Gascon) qui l'inspire encore aujourd'hui, par exemple les huitres en crépinette gourmande (même si la recette ne figure pas dans le livre), et Alain Chapel, lui aussi proche des paysans et de l'agriculture, et où il s'est lié d'amitié avec François Gagnaire, le chef d’Anicia (un des 100 meilleurs bistrots de Paris) venu le féliciter ce soir en voisin. Enfin Alain Ducasse dont il est devenu dans les années 2000 le Victorinox (p. 25), du nom du couteau Suisse qui s'adapte à toutes les situations.

Il a oeuvré à la conception de nombreux restaurants pour Alain Ducasse, comme le Spoon, qui a véritablement révolutionné l'univers de la haute cuisine en 1998. Le dîner que j'y ai savouré reste encore très vif dans ma mémoire pour l'audace des préparations. Au moment de quitter l'hôtel Marignan on vous offrait un sachet de cookies. Il me semble que c'est une attention unique. Et en fin de compte originale, comme l'était la cuillère fourchette qui accompagnait l'arrivée du dessert.

En 2011 il devient premier maître à bord du 39 V qui est une sorte de "nacelle" niché au 6ème étage, pour des raisons financières mais pas que. Le restaurant a été conçu de forme circulaire comme un savarin pour offrir une vue panoramique sur les tables et les cuisines. Avec au centre une terrasse-jardin suspendue. Et une table ouverte pouvant devenir table d'hôtes depuis laquelle rien n'échappe aux convives.

La transparence est un des mots-clé pour décoder sa personnalité et son credo. C'est avec modestie que Frédéric Vardon m'apprend comment il s'y est pris pour faire le livre et choisir les recettes : On a juste imprimé les nôtres, mais la difficulté fut de les adapter à un contexte familial, avec des techniques accessibles, et adapter les temps de cuisson.

Ce livre est un hommage à ses équipes et ses fournisseurs, en produits frais mais aussi à son architecte comme à celui chez qui il a choisi la vaisselle. Tout est dans le détail et les pages intérieures de la couverture évoquent les stries des verres du restaurant, imaginés par l'Exploreur en verre soufflé pour libérer la puissance aromatique des vins, exigence largement justifiée quand on apprend que sa cave renferme 1500 crus, conservés à trois niveaux différents de température. Il accorde à chacun de ses producteurs (à partir de la page 42une double page et un gros plan. Maintenant (p. 64 et suivantes) on peut entrer, pour le lecteur, dans le vif du sujet, la cuisine.
La discussion est facile avec le chef, tout en dégustant les amuse-bouches fondants, parfumés et délicats qu'il avait préparés pour la soirée. A la question insistante pour déterminer le type de cuisine qu'il fait il refuse de concéder que le gastronomique soit une cuisine de tradition ou de création. Le terroir peut se développer dans le modernisme. Les somptueuses photos du livre le démontrent.

Comme aussi le choix des recettes. On trouve par exemple (p. 98) une association de Légumes de saison mijotés ensemble, qui comblera (aussi) les végétariens.
J'ai eu la chance au moment de partir de découvrir un aperçu des desserts qui sont actuellement à la carte, comme ce Mont-blanc, marrons glacés, whisky, meringue, tout en légèreté et subtilité dont j'ai retrouvé ensuite la recette page 166.

Ne tranchons donc pas entre tradition et création. Tout est assurément une histoire de passion. C'est ce qui se dégage aussi de l'atmosphère de cette librairie particulière où je vous conseille de passer un long (et bon) moment. Vous y trouverez des livres, c'est une évidence, mais choisis pour la particularité de leur harmonie entre forme et fond.
Les enfants ne sont pas oubliés avec un coin qui leur est réservé. J'ai remarqué cette Cuisine aux crayons d'Hervé Tullet qui est un auteur qui sait comment faire comprendre l'abstrait à de jeunes enfants.
Appétit a été créé il y a un an autour de l’idée de proposer dans le même lieu des livres de cuisine (pas forcément de recettes) des objets et des produits alimentaires, comme ces infusions Chic des plantes, ou ces petites tasses réalisées par une japonaise ... vivant à Paris, ou les mêmes bols que ceux qu'Alain Ducasse utilise pour ses restaurants.
Les produits Kalios sont là pour moi dans une grande évidence alors que je me surprends à saliver devant ces saucissons perpétuels qui pendent, suspendus à des crocs de boucher.
On savoure ici beaucoup avec les yeux ... ces champignons semblent si vrais. Sandrine, qui est une des fondatrices, a l'art d'associer tout cela.

A un mois des fêtes de fin d'année cette soirée ouvre de multiples perspectives alors qu'on commence à envisager quels cadeaux on peut dénicher. Les livres en font partie, les repas gastronomiques aussi. Il tarde à beaucoup d'entre nous d'aller vérifier sur place les (excellentes) impressions de cette dégustation. En attendant, Frédéric Vardon pose la première assiette d’une longue tablée qui va composer la collection Signature.
Frédéric Vardon, Aubergiste parisien, collection Signature, Flammarion, en librairie depuis le 8 novembre 2017
Librairie Appétit, 12, rue Jean Ferrandi 75006 Paris
Ouverte du mercredi au samedi de 11h00 à 19h00

J'accrocherai sur mon front un as de coeur

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Comment ne pas être touché par ce spectacle totalement inédit ? L'Espace Cirque d'Antony (92) nous a habitué à des créations exceptionnelles, mais il faut convenir que J'accrocherai sur mon front un as de coeur est absolument éblouissant de tendresse et d'intelligence sans rien concéder à une très haute technicité.

La famille Pagnot est connue pour savoir tout faire en matière de voltige équestre avec une technique de virtuoses. Leur compagnie Pagnozoo nous avait éblouis il y a deux ans avec la très belle partition Emmène-moiAnne-Laure Liégeois a l'expérience de la mise en scène de textes classiques comme de théâtre contemporain, mettant son savoir-faire exigeant au service de Centres dramatiques nationaux mais aussi du grand plateau de la Comédie Française. Le groupe Louise Jallu et Tango Carbon rassemble des musiciens très doués.

A priori, tout ce beau monde n’avait aucune raison de se rencontrer. Marc Jeancourt, le patron du Théâtre Firmin Gémier-la Piscine, qui les connait tous et qui a une imagination fertile a suggéré à ces talents apparemment opposés de travailler ensemble et il a eu bien raison d'avoir initié un tel projet. La création est purement exceptionnelle et totalement accessible à un large public dès l'âge de 5 ans.

Une forte odeur chevaline se perçoit depuis la passerelle qui mène à l'Espace cirque. Et c'est Anne-Laure Liégeois elle-même qui distribuait les programmes à l'entrée quand je suis passée.

A l'intérieur du nouveau chapiteau de la compagnie le violon couvre à peine le brouhaha. Les musiciens sont installés comme à l'intérieur d'une caravane ouverte sur la piste. Deux chevaux attendent patiemment l'heure du départ. On remarque le dos très large du Clydesdale qui accueillera les voltigeurs et la ligne svelte de l'Espagnol qui est danseur par excellence. Les hennissements des autres sont clairement perceptibles depuis les gradins.
On retrouvera dans quelques minutes tous les cavaliers (et les chevaux !) du précédent spectacle. Les animaux sont impatients de fouler la sciure alors que Jacques Pagnot, alias Monsieur Loyal, y moissonne des étoiles. Le cheval refuse le cadeau ... on jurerait qu'il en sourit, l'animal ... Nous sommes bien au théâtre.

Anne-Laure a beaucoup observé les circassiens et les chevaux. Elle a saisi leur technique et le potentiel qu'elle pouvait solliciter pour théâtraliser les numéros et leur donner une ligne poétique. Les sentiments et les sensations qu'ils suscitent sont ainsi devenus matière théâtrale.

Le spectacle a commencé, en douceur. Un cheval est ce soir partenaire de la ballerine, capable de lui faire la révérence, de la serrer entre ses pattes pour un câlin flanc contre flanc. Un autre dansera le tango. Les sabots claqueront sur le parquet. Il y aura des dérapages contrôlés. Et parfois ce sera un swing qui animera le couple. Les danses seront charnelles. Et la musique sera toujours en accord parfait avec chaque scène.

Avec de multiples évocations comme la bouleversante chanson de Léo Ferré Est-ce ainsi que les hommes vivent ?

Tout s'enchaine en douceur. Une écuyère prend le temps de se plonger dans un livre, sans doute un conte. Plus tard un petit prince et une minuscule princesse (les très jeunes Soan et Lilia Pagnot) réveilleront qui la femme, qui l'homme. Un prince s'élancera sur son cheval noir comme le jais.

Le public vibrera quand les chevaux galoperont à pleine puissance. On retiendra notre souffle quand les voltiges deviendront périlleuses. Et quand la fragile enfant s'envolera on s'interrogera : effet voulu ou accident évité de justesse ? C'est en tout cas très beau et on fond quand l'animal nous regarde droit dans les yeux.
Les costumes sont judicieux avec abondance de tulle pour signifier l'univers de la danse. Les crinières sont magnifiques, parfois colorées.

Les trois univers (cirque-musique et théâtre) s'enrichissent les uns l'autre : figures à cheval, atmosphère musicale et théâtralisation sous des lumières soignées pour réinventer le cirque. Ce soir la démonstration nous est magistralement faite que le cirque (aussi) est un théâtre. La metteuse en scène  a réussi le pari de raconter une histoire avec d'autres mots que la parole : ceux du geste, du mouvement, de la prouesse, ceux du cheval. Son silence, le bruit de sa course, son dialogue intense avec l'homme, tout cela sans les mots, sans la parole, comme elle le dit elle-même, autour du thème du besoin de l'autre, faisant naître une histoire simple, celle d'un cirque plongé dans une sorte de mélancolie jusqu'à l'arrivée de l'Etranger...

Et si vous n'êtes pas encore convaincu visionnez cet extrait.

Marc avait bien raison de tenter l'extra-ordinaire. C'est un vrai cadeau de Noël au public.

J'accrocherai sur mon front un as de coeur
Théâtre équestre de la Compagnie Pagnozoo
Mis en scène par Anne-Laure Liégeois, assistée de Inès Garde
Avec en piste Nolwen Gehlker, Alice Pagnot, Calou Pagnot, Jacques Pagnot, Johan Pagnot et Mickaël Thabourey, avec la participation de Soan et Lilia Pagnot
Musique : Bernard Cavanna et Louise Jallu
Et les chevaux Timothé, Viking, Victor, Papito, Kala, Oman, Andy, Leston, Néomio, Mitico et Pompom.
Musiciens : Louise Jallu, bandonéon, Mathias Lévy, violon, Grégoire Letouvet, piano et Alexandre Perrot, contrebasse
Création lumière : Dominique Borrini et Patrice Lechevallier
Costumes de Séverine Thiébault
Durée : 1h
Du 24 novembre au 23 décembre à l'Espace cirque d'Antony
Rue Georges Suant, 92160 Antony - 01 41 87 20 84
A 20 heures les vendredi et samedi (sauf le samedi 9 décembre, 18 heures)
Les dimanche à 16 heures
Supplémentaire à 15 heures le samedi 23 décembre
Représentation scolaire : lundi 11 décembre 14h30
Le spectacle sera ensuite en tournée en commençant par Goussainville du 26 au 28 janvier 2018

Il ne faut pas manquer non plus cette saison Les Époux dans la mise en scène de Anne-Laure Liégeois que j'ai eu la chance de voir il y a quelques mois et qui m'a totalement enthousiasmée.

La Folie en tête à la Maison de Victor Hugo

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Les expositions programmées à la Maison de Victor Hugo se suivent et ne se ressemblent pas même si le grand écrivain en est forcément le fil rouge.  La folie succède aux costumes espagnols.

Cette exposition est organisée de façon chronologique à travers quatre grandes collections européennes, pour mettre en lumière près de 200 oeuvres parmi les plus anciennes et  qui ont été peu ou pas vues en France.

Clandestines, fragiles, jetées sur les murs de l’asile ou sur des matériaux de hasard récupérés en cachette, dessins ou peintures, broderies ou objets, chacune de ces oeuvres, nous ouvre un univers et nous plonge aux racines de l’Art brut, justifiant le sous-titre de l'exposition, Aux racines de l'art brut.

Cette exposition s'ancre bien évidemment dans la vie de Victor Hugo qui a été confronté à la folie de son frère Eugène puis de sa fille Adèle avec comme fil conducteur l'évolution du regard porté sur la folie au XIX° siècle. La folie est alors volontiers l'explication rationnelle de l'irrationnel auquel le siècle ne croit plus.

Philippe Pinel (1745-1826) fut précurseur de la psychiatrie en osant le premier retirer les chaines des malades mentaux dès 1792. Après la Révolution française, il bouleverse le regard sur les fous en affirmant qu'ils peuvent être compris et soignés.

C'est une chance que les aliénistes aient porté une attention soutenue aux productions de leurs malades et qu'ils les aient conservées. Beaucoup ont une âme de collectionneur, pour le plaisir, ou à des fins thérapeutiques car certains les suscitent parfois à des fins "d’art-thérapie".



Collection du Dr Browne
Fondé à Dumfries, en Écosse, en 1838, le Crichton Royal Hospital fut une institution pionnière en matière d’art thérapie à l'initiative de Elisabeth Crichton qui créa un "asile pour lunatiques" avec une partie de la fortune que lui légua son mari, médecin. William A. F. Browne (1805-1885) y a réuni de 1838 à 1857 une importante collection des productions des patients, qu'il encourageait à s'occuper par le travail et toutes les formes de loisirs.
On peut admirer la délicatesse de cette aquarelle sur papier de Joseph Askew, intitulée Still life with Tankard and Pot Plants. Et l'art du portrait dont fait preuve William Bartholemew avec ce Sketch of three Gentelmen, réalisé vers 1856-1864 à l'encre et au crayon sur papier.
Le degré de complexité des oeuvres est variable mais toutes sont étonnantes.

Collection du Dr Auguste Marie
Très tôt, Auguste Marie (1865-1934) porta attention aux travaux des malades, encourageant à la fois leur créativité et l’activité même de collection, en particularité lorsqu’il fut en poste à Villejuif, où il est nommé en 1900. Sa collection fut dispersée, mais une partie essentielle fut acquise par Jean Dubuffet et se trouve aujourd’hui à la Collection de l’Art Brut à Lausanne.
On découvre des aquarelles de la taille d'un timbre-poste, sans titre, simplement attribuée au Miniaturiste.
On remarquera aussi ce pastel sur papier, anonyme, qui évoque singulièrement Renoir. Une question me taraude : est-on artiste avant d'être fou ou la folie rend-elle artiste ? Je sais que seuls deux patients étaient des artistes professionnels mais peut-être que certains malades étaient artistes sans le savoir ...
La finesse de plusieurs tableaux impressionne.

Collection Walter Morgenthaler
Conservée au Psychiatrie-Museum de Berne, cette collection est issue de l’asile de la Waldau (die Bernische kantonale Irrenanstalt Waldau), rendu célèbre par la présence de personnalité comme Robert Walser et surtout Adolf Wölfli reconnu comme une figure tutélaire de l’Art Brut. Le Dr Walter Morgenthaler (1882-1965) dirigea l’institution de 1913 à 1920.
Adolf Wölfi fut son plus illustre patient. Voici un de ses (petit) tableaux, réalisé à la mine de plomb et crayon de couleur sur papier.
Constance Schwartzlin-Berberat nous laisse un livre de cuisine très étonnant, de 64 pages, encre sur papier (1891-1909) où elle consigne des recettes sans accorder le moindre espace entre deux, provoquant une lecture en quelque sorte indigeste.

Collection Prinzhorn
Commencée dès la fin du XIXe siècle à l’hôpital psychiatrique de l’Université de Heidelberg cette collection est devenue mythique par le livre publié à partir de son étude, en 1922, par Hans Prinzhorn (1886-1933), Expressions de la Folie, qui eut une grande influence sur les artistes d’avant-garde. C’est aussi dans cette collection que les nazis ont puisé les œuvres incluses dans l’exposition d’art dégénéré en 1937.

C'est une oeuvre d'August Klett qui a été choisie pour l'affiche de l'exposition. Sa production est extrêmement colorée. En voici un extrait avec Sucrerie Heilbronn, feuille 14, 23 mars 1919, mine de plomb, aquarelle et blanc opaque sur papier.
Les oeuvres répétitives sont rares dans cette exposition. On remarquera celle-ci de Joseph Heinrich Grebing, sans titre, avant 1920, stylo plume sur papier.

Il est complexe de les analyser, et il n'est pas certain qu'il soit utile de les comparer. Il est préférable, de mon point de vue, de les apprécier en tant que tel.

La Folie en tête, Aux racines de l'art brut
A la Maison de Victor Hugo
6 place des Vosges - 75004 Paris
Du 16 novembre 2017 au 18 mars 2018
Ouverte du mardi au dimanche de 10h à 18h.
Fermée le 25 décembre et 1er janvier

Mon père, ma mère et Sheila d'Eric Romand chez Stock

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C'est en sortant du spectacle Comme à la maison que j'ai eu envie de lire le livre d'Eric Romand. Sobre, pudique et néanmoins sans filtre, cet ouvrage, qui est un premier roman, est d'une sincérité qui ne fait aucun doute. Le ton est très personnel et ça sonne juste.

Tout le monde, dans les années soixante-dix, n'avait pas accès à ce qu'on appelle "la culture". Beaucoup de foyers ne s'intéressaient pas à la lecture (en dehors des prescriptions de l'école), n'allaient jamais au concert ni même au cinéma. C'était souvent la télévision qui constituait la principale ouverture sur l'extérieur. Ne disait-on pas "la fenêtre" dans de nombreuses familles ...

Les vedettes dites yé-yé prenaient une importance démesurée dans l'imaginaire des adolescents. Ce n'est pas un hasard si Johnny Halliday a pu prendre autant de place. Une chanteuse incarnait cet idéal d'ascension sociale, parce qu'elle était issu de la classe populaire, ayant été vendeuse de bonbons sur les marchés et propulsée très jeune sur les podiums.

Quelques années plus tard elle a représenté un certain idéal féminin, vêtue de paillettes, entourée de danseurs un peu à l'instar d'un modèle masculin qui était Claude François. L'auteur est fasciné par la chanteuse dont il comprendra plus tard qu'elle fut l'icône gay parfaite.

Les paragraphes s'enchainent comme les jours d'une année sans surprise, au sein d'une famille maladroite quand il s'agit d'exprimer des sentiments. le père est virulent, la mère en retrait et le jeune homme ne se sent pas accepté et perçoit que son orientation sexuelle ne sera pas plébiscitée.

Il se délivre de ce passé en partageant avec nous l’album de sa famille, issue d’un milieu populaire, avec ses codes, ses tabous, ses complexes, son ignorance, ses contentieux, dans les années 70 et 80. Il raconte son enfance solitaire au milieu des turbulences. Pour son entourage, il a des goûts bizarres, des attitudes gênantes, des manières qui provoquent la colère de son père et la désolation de sa mère. Il dessine des robes et coiffe les poupées de sa sœur. Il fait son possible pour ne pas ajouter au malaise. Pour s’échapper, il colle son oreille à son mange-disque. Regarde les émissions de variétés scintillantes… Et admire une célèbre chanteuse dont il aime les robes moulantes, les refrains joyeux. Il voudrait être elle. Il voudrait être ailleurs ...

L'essentiel est dit avec la même nostalgie douce amère que l'on connait au théâtre dans les pièces écrites par Eric Romand. Sans oublier son humour qui permet d'évacuer les tensions.

Mon père, ma mère et Sheila d'Eric Romand chez Stock

MontparnassE présente son troisième album Aux gouttes de Dieu

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J'ai eu la chance de découvrir l'artiste en même temps que son dernier album.

Il m'avait donné rendez-vous il y a quelques jours Aux Gouttes de Dieu, une cave à vins située 8 rue Rossini - 9ème. Avant que ce ne soit son QG, Philippe avait davantage l'habitude d'écrire sur une table d'un café, juste en face du studio où enregistrait Jean-Patrick Capdevielle qui fut le premier à reconnaitre son talent, d'auteur et de musicien. A un moment de son parcours où il croyait fermement qu'on pouvait improviser un groupe, sans musiciens fixes.

C'est donc assez naturellement qu'il a pris alors ce nom de MontparnassE qui est celui d'un quartier parisien, en lui donnant de la noblesse avec une majuscule au début comme à la fin. Il repris cette astuce typographique pour l'album AnachroniquE. Philippe aime les mots équilibrés.

C'est un épicurien, aimant bien manger, boire du bon vin, fumer un cigare ... logique qu'il présente son disque parmi ses potes dans un endroit où il fait bon passer une soirée, même si le son n'y est pas des meilleurs. L'ambiance compte plus que tout et la soirée a coulé doux, comme une fête autour de l'album qui sortait ce soir là.
Les photos de la pochette ont été faites dans une prison lilloise désaffectée, aujourd'hui démolie. On avait un peu reproché à Philippe d'avoir écrit des albums sombres. Il a entendu la leçon et a voulu de la couleur pour celui-ci. Il a failli appeler cet album Technicolor mais la société qui porte ce nom s'y est opposée. Ce fut (des) Couleurs manifestes. Avec (des) entre parenthèses, parce que c'est joli.

L'album a été rendu possible grâce à l'investissement des personnes qui ont cru en lui, un peu plus de 162 qui figurent en quatrième de couverture du livret, et qui lui ont inspiré Kiss Kiss qu'il interprète en duo avec Capdevielle mais que nous n'entendrons pas ce soir.
Pour cette soirée de lancement il a retenu la majorité des titres de l'album en ajoutant quelques autres, plus anciens. Lui qui chante en groupe démarre seul, avec Hero in. Seul mais bien entouré, puisque le réalisateur du disque, Vincent Perrot (arrangeur sur quelques titres d’AnachroniquE, 5 ans plus tôt) est à la guitare, est présent et l'accompagne pour Another Strange Day, premier titre du nouvel album, qu'il chante en français quoiqu'en laisse penser le titre en anglais.
Il enchaine avec Si tu m'emmènes, une chanson un peu ancienne, autour des préoccupations d'un adolescent fou de rock et de filles. L'enfer du paradis aborde la condition féminine. Et si on pose des couleurs sur les chansons on mettra du rose sur D'elle ... qu'il sifflera pour commencer. Il l'a écrite pour parler d'une fille qui le suit partout depuis 4 ans et qui le mène par le bout de son (petit) nez, en toute logique puisque c'est sa fille.

La famille est un axe important pour Philippe qui a consacré systématiquement un titre à un de ses enfants dans chacun de ses trois albums.

St Patrick's Day fut écrit dans un pub. Ce n'sont pas des anges est en quelque sorte dédié aux fils de bonne famille et aux copines bourgeoises de maman à l'heure du thé.

Couleurs manifestes arrive en seconde partie de la soirée, lui donnant l'occasion d'expliquer la tonalité qu'il a voulu donner à l'album, suivi de Never Mind qui célèbre les femmes qui affrontent la vie coute que coute.
Ce seront ensuite deux titres chantés en duo avec une chanteuse très prometteuse, Marie. Il confie qu'il a failli enregistrer On s'est menti avec Alain Souchon. On sent que ce n'est que partie remise. Peut-être lorsqu'ils auront diné ensemble ici même un soir prochain....

Sur le disque c'est Cali qui interprète Ecoute-moi jusqu'au bout, dont il signe les paroles alors que Philippe a composé la musique comme il l'a fait de tous les titres, à l'exception de la reprise de Ma France, une chanson de Jean Ferratà laquelle il donne une autre teinte, sans pour autant aller jusqu'à l'électro qui domine tout l'album.
Ce titre s'est imposé quand il a senti la France agressée, meurtrie, mise en cause par les attentats puis devenant le centre du monde. Le texte de 1969 prend une ampleur nouvelle. Chaque mot a son importance dans cette superbe reprise.

Auparavant il aura célébré une autre grande figure mythique, celle d'un immense acteur qui connait bien lui aussi ce quartier de Montparnasse. C'est en 2013 qu'il a écrit Quand j'étais Jean-Paul Belmondo, prétexte à faire défiler les prénoms des actrices qui ont été ses partenaires à l'écran et qui lui a valu d'être invité sur le canapé rouge de Michel Drucker avec son idole.

Cette année-là fut faste pour Philippe qui a composé la bande originale du film Le Cœur des Hommes 3.

Un vinyl (rouge) a été pressé pour l'occasion. Il est bien davantage que la copie du CD. On sent combien l'artiste a le souci du détail. Il dit avoir découvert la scène assez tard et doit cumuler avec un autre métier pour faire vivre sa famille. Mais la musique est sa passion, cela se sent. Une musique qui se doit d'être partagée, voilà pourquoi il aime un lieu comme ce bistrot où il vient régulièrement boire des coups. Il aura juste suffit ce soir d'ajouter deux guitares, d'appeler Vincent et Marie ... et de faire signe aux amis.

Quelques dates sont déjà arrêtées mais sans parler d'une tournée. Alors pour le moment c'est surtout l'album qui permet d'apprécier ces dix nouveaux titres et leur tonalité électro très réussie avec la complicité (et le talent) de Vincent Perrot.
C'est Olivier Mouton qui a créé l'endroit il y a trois ans, en septembre 2014, avec l'idée sous-jacente que ce puisse être une sorte de showroom pour ses clients professionnels puisque son premier métier est de sélectionner des vins.

Il promet avoir ici de tout, y compris des bouteilles de Haute-Savoie peu connues en région parisienne comme la Mondeuse (du Domaine des violettes), des Juras somptueux ... 520 bouteilles attendent d'être saisies, 50 champagnes, 90 alcools. Olivier aime conseiller, après avoir posé quelques questions à la clientèle pour la convaincre de tenter quelque chose de nouveau. Le prix est inscrit à la craie sur le goulot. On le divise par quatre si on désire consommer au verre. Et celui-ci est souvent vintage, siglé de marques bien connues.
Les carafes accueillent des bouquets de fleurs champêtres. Aux gouttes de Dieu est une petite brasserie revisitée. Avec quelques tables hautes prêts du comptoir, d'autres plus intimes dans la salle du fond (où par contre on n'entendait pas la musique). Le menu est très raisonnable pour le déjeuner, afin de permettre à la tablée de s'offrir (en toute modération) une bonne bouteille, parce que c'est tout de même l'ADN du lieu.
Le soir on hésitera entre quelques plats dits canaille comme l'oeuf mollet qui, m'a-t-on dit est meilleur qu'un oeuf parfait. A moins de préférer une feta grecque de l'ile de Lemnos avec quelques olives de Kalamata.
On trouvera aussi dans les assiettes du caviar d'Aquitaine, un Gravlaax maison, un carpaccio de boeuf maturé, un tartare charolais au couteau. On pourra opter pour la cocotte du jour, qui pourra être un plat de lentilles mitonné dans une céramique. Et de multiples planches de charcuteries et de fromages.
C'est Greg, l'associé d'Olivier, qui déniche des assiettes aux Puces. C'est aussi à sa grand-mère, Mamie Loulou, que l'équipe doit la recette d'un riz au lait longuement cuisiné avec de la vraie vanille. L'adresse est à retenir !

Cuisiner Saint-Agur, fromage et crème

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Depuis plusieurs années le Chef Juan Arbelaez travaille des recettes en association avec Saint-Agur que l'on peut réaliser à partir d'une Box spéciale. J'ai eu il y a quelques mois la chance de gouter sa cuisine et je lui fais confiance. Quand j'ai su qu'il avait imaginé plusieurs nouvelles recettes pour Saint-Agur c'est sans hésitation que j'ai suivi ses conseils ... à défaut de pouvoir me mettre les pieds sous sa table puisque je n'étais pas disponible le jour de l'invitation.

Le risotto de Juan Arbelaez

Ingrédients pour 2 personnes :
- 250 g de riz Carnaroli (un riz spécial risotto)
- 90 g de jambon noir de Bigorre
 - 1 à 2 tranches de Saint Agur de 135 g
- 15 cl de vin blanc
- 1 poire (j'aime particulièrement la Conférence)
- 60 cl de bouillon de volaille chaud
- Huile d'olive
- Poivre

On fait chauffer une bonne cuillère à soupe d'huile d'olive et quand elle est chaude on ajoute le riz  et on mélange à la cuillère de bois jusqu’à ce qu'il devienne nacré.
On déglace au vin blanc sec, et lorsqu'il s'est évaporé on commence à mouiller avec une louche de bouillon. On continue louche par louche jusqu'à ce que le riz soit cuit. Il faut compter environ 20 minutes.
Hors du feu on ajoute le Saint Agur et on remue jusqu'à ce que le fromage fonde complètement et lie tout le riz.
Dans une poêle on caramélise des quartiers de poire avec un peu de gingembre en poudre.

On dresse dans des assiettes creuses en disposant quelques morceaux de poire confite, et des lamelles de jambon noir de Bigorre, sans oublier un tour du moulin de poivre.
J'aurai bientôt l'occasion de vous parler de ce jambon d'exception qui vient de célébrer son AOC.
Saint-Agur et potimarron :
J'ai aussi apprécié ce jambon posé sur une tartine de Saint-Agur en accompagnement d'une soupe de potimarron, qui est un légume de saison.
Il s'accorde aussi bien avec une purée de potimarron.
Quant à la crème de Saint-Agur elle rehausse à merveille une entrecôte. Et là encore s'accorde avec les potimarron rôti. Je ne suis pas étonnée que le Chef emploie ce fromage pour contiser un chapon.  Il écrase le fromage et le place dans une poche à pâtisserie pour le glisser sous la peau de la volaille qu'il a préalablement décollée. Il cuit le chapon au four 2 heures. Après une bonne heure de cuisson on dispose dans le plat autour de la viande des pommes de terre, des quartiers de poire, des gousses d'ail et du thym effeuillé, Pensons-y pour Noël.
Je testerai une autre de ces suggestions : un carpaccio de champignons arrosé d'une vinaigrette de balsamique blanc et d'huile parfumée à la truffe, rehaussée de dés de saint-Agur et de cerneaux de noix concassées.
Et pourquoi pas une crème brûlée avec ce fromage étonnant !

Rencontre avec Anne Fine et Véronique Deiss pour l'anniversaire du Chat assassin

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On fête ce soir un anniversaire très particulier, celui d'un chat anglais dont les aventures sont davantage suivies et appréciées en France que dans son pays d'origine.

C'est cependant à l'ambassade de Grande-Bretagne, 39, rue du Faubourg-Saint-Honoré, Paris 75008, qu'un hommage lui fut rendu ainsi qu'à ses auteures, Anne Fine pour la rédaction de ses péripéties, et Véronique Deiss pour lui avoir donné un corps ... du moins en France parce que j'ai appris avec surprise qu'il n'y avait pas que le texte qui était traduit, les images aussi en quelque sorte puisque c'est un illustrateur différent qui est choisi dans chaque pays.

L'Hôtel de Charost est un somptueux hôtel particulier, préservé dans toute sa splendeur, y compris avec son mobilier d’époque. L'hôtel est resté le plus possible tel que Pauline Bonaparte l'a connu, avant de le vendre au Duc de Wellington.

La soirée fut très sympathique, et il est bien agréable de constater qu'on peut imposer une trêve depuis la mauvaise nouvelle du Brexit. Le mot est d'ailleurs le titre d'une oeuvre, posée sur un meuble de l'entrée, où l'on voit Churchill tendre la main à un soldat allemand, symbolisant les fraternisations qui eurent lieu à Noël en 1914.
La nuit tombée ne nous a pas permis de goûter aux plaisirs du jardin que la neige a finement recouvert d'un voile blanc, particulièrement romantique vu depuis la verrière. Mais nous avons eu la chance de pouvoir déambuler dans les salons et les pièces du rez-de-chaussée pour admirer de près le mobilier et la décoration (voir description en fin d'article). Il vous faudra attendre les prochaines journées du Patrimoine pour faire de même. Nous nous sommes ensuite installés dans la salle de bal pour suivre les discours officiels. Lord Edward Llewellyn, Ambassadeur de Grande-Bretagne en France s'exprima le premier. Marié à une française, père de trois jeunes enfants, il a salué la popularité d'Anne Fine en France.
Bob Lewis, le nouveau directeur du Bristish Council a insisté sur sa volonté de développer les partenariats. Et naturellement, Louis Delas, le directeur de l'Ecole des loisirs a souligné les 20 années de collaboration avec Anne Fine, dont 7 livres consacrés aux aventures du Chat assassin, en annonçant la probabilité d'un dessin animé dans les mois qui viennent.

Comme à son habitude, Anne Fine a répondu avec franchise et sans langue de bois aux questions de Maya Michalon. Il vaut mieux pour tout le monde que je sois devenue écrivain sinon j'aurais commis des meurtres, a t-elle déclaré.
On comprend qu'elle se soit incarnée de son vivant dans la personnalité d'un chat, même si et peut-être parce que elle n'aime pas du tout cet animal. Elle a juré que jamais elle ne mettrait sur un mur un portrait de ce personnage pourtant si populaire.
Et pourtant lorsque son illustratrice Véronique Deiss lui fait cadeau d'un dessin original (et même de deux !) elle semble concéder avec une certaine joie qu'elle va s'y résoudre. Les croquis sont suffisamment subversifs pour réussir à la convaincre. Véronique Deiss dessine les expressions au pied de la lettre, ne cherchant jamais à adoucir (à l'inverses des versions originales anglaises). Alors gageons qu'Anne s'amusera en les accrochant.
Anne Fine est étonnante, très sympathique quel que soient ses propos, souvent exagérés, par provocation ou par dérision. Il est difficile de se faire une idée précise et de savoir quand elle dit vrai et quand elle déforme la réalité. Les français ont bien compris que tout cela n'est qu'une posture et l'acceptent sans réserve. Seraient ils plus sensibles à l'humour dit anglais que les britanniques eux-mêmes ?
Il faut reconnaitre que ce chat et d'une telle mauvaise foi qu'il en devient attachant alors que rien dans son comportement n'est prévu pour attirer la sympathie. Quand il fait une bonne action, c'est un hasard, une maladresse en quelque sorte. L'écriture de Anne Fine est très précise, sans concession, et la traduction respecte ce point de vue. L'illustration également. Quand on compare son allure actuelle avec la couverture du premier opus on remarque que l'animal a bien vieilli depuis 20 ans. Son nez s'est épaissi. Véronique confesse, avec son charmant accent alsacien, qu'elle s'est inspirée ... de son chien, sans doute pour lui donner une certaine férocité.
Anne a été très sollicitée pour une longue séance de dédicace qui ne lui a pas laissé beaucoup de temps pour gouter les toasts au saumon et les bulles d'une cuvée classique de Nyetimber. Ce fut une découverte pour moi qui ne pensait pas qu'un vin effervescent pouvait rivaliser avec le champagne. Celui-ci est le résultat d'un assemblage de chardonnay (62 %), pinot noir (19 %) et pinot meunier (19 %). Il est produit dans le Sussex, par une maison qui est le fer de lance des producteurs de sparkling  bubbles britanniques. J'ose dire que j'ai aimé.
Anne Fine est née à Leicester en 1947. Elle a étudié l'histoire et les sciences politiques à l'université de Warwide et a enseigné à Coventry, à Sanghton Jail et à Edimbourg. Les livres qu'elle écrit pour la jeunesse lui valent un énorme succès. Quand papa était femme de ménage, a inspiré le film Madame Doubtfire avec Robin Williams. L'École des loisirs a publié plus d'une vingtaine de ses ouvrages. En 1986, elle publie son premier roman pour adultes Un bonheur mortel.
Avec l'hôtel d'Évreux – aujourd'hui l'Élysée –, l'hôtel de Charost est le dernier des hôtels du début du XVIII° siècle à encore se dresser rue du Faubourg-Saint-Honoré. Il faut l'imaginer à sa construction, au milieu de fourrés et en pleine campagne. Le corps de logis et les pavillons d’entrée ont été construits entre 1722 et 1725 pour Armand de Béthune, second duc de Charost et gouverneur de Louis XV, par l’architecte, ingénieur militaire et cartographe Antoine Mazin (1679-1740), qui a également construit l’Hôtel de Matignon.
Inhabité pendant la Révolution, l’ensemble est acheté en 1803 par Pauline Leclerc, la sœur préférée de Napoléon, âgée de 22 ans et veuve elle aussi. En 1804, le Premier Empire est proclamé et il devient résidence impériale sous le nom de Palais Borghese puisque Pauline a épousé en secondes noces le prince de Borghese  Elle s'empresse alors de rénover le palais selon ses goûts. Aujourd'hui, la plupart des meubles, des objets, des lustres, des pendules datent encore de son passage.
 
Le duc de Wellington l'achètera à Pauline Borghese au nom de George III en 1814, pour y ouvrir la première ambassade de Grande-Bretagne permanente à l’étranger. Ce qui peut paraître amusant, c'est que les louis d'or remis par Wellington à Pauline pour l'achat de l'hôtel servirent finalement à Napoléon pour financer son retour de l'ile d'Elbe.
En 1833, le musicien Berlioz y épousa l'actrice irlandaise Harriet Smithson avec pour témoin le pianiste Lisz. En avril 1874, les parents de Churchill s'y marièrent également et, dit-on, y conçurent leur valeureux fils la même nuit. Churchill serait donc un tout petit peu français… A l'inverse, et toujours en 1874, la mère de l'écrivain Somerset Maugham se fit transporter d'urgence à l'ambassade pour y accoucher en terre britannique afin que son fils ne fût pas français. On ne doute pas être sur un morceau de territoire de sa Majesté dont le portrait orne discrètement la table.
Toutes les aventures du Chat assassin ont été publiées à l'école des loisirs, dans les traductions de Véronique Haïtse et avec les illustrations de Véronique Deiss.

Chiara Conticini expose chez Les Rois du Monde

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Dès qu'elle a su tenir un crayon entre ses doigts, Chiara Conticini s'est mise à dessiner. Elle avait quatre ans et elle ne s'est jamais arrêtée.

C'est en voyant une de ses amies collégienne dessiner elle aussi que son désir de le faire "sérieusement" s'est définitivement forgé.

Elle n'a que quinze ans, et un talent déjà épanoui, qui éclate sur les murs de la première galerie qui a décidé de l'exposer pendant une semaine. Il s'agit de l'association Les Rois du Monde qui a ouvert un espace d'exposition avec pour objectif de mettre en avant de très jeunes talents.

Le vernissage, le jeudi 30 novembre, a eu lieu sous des auspices gourmandes mais on peut parier que les grands chefs pâtissiers et leurs épouses comme Pierre Hermé et Valérie, ou Christophe Michalak et Delphine McCarty ont été bluffés par son coup de crayon.

Egalement par sa générosité (permettez-moi de dire que c'est de famille !) qui a permis qu'une partie de la vente de ses oeuvres soit investie dans l'achat de matériel artistique destiné à des enfants talentueux qui en ont besoin.

On connait la musique. Il n'y a pas de rapport mais cette proximité est favorable pour la notoriété de l'association. Elle multiplie, depuis sa création en 2006, les actions en faveur des enfants porteurs de handicap (depuis un simple bégaiement jusqu'à des pathologies très sévères). Des ateliers gratuits sont dispensés ici, en musique et dans le domaine de l'art qui agissent comme des thérapies. Un gala a lieu chaque année en février-mars et permet de récolter des fonds importants. Toute l'année des actions sont entreprises dans les hôpitaux en direction d'enfants de 0 à 18 ans.

L'association tente aussi de réaliser des actions que lui demandent des enfants et adolescents qui connaissent des problèmes de santé. Ce peut être des évènements, des sorties culturelles, des visites de parc, des voyages, des entrevues avec des célébrités. Certaines demandes sont raisonnables, d'autres extravagantes. Récemment ils ont permis à une jeune fille trisomique de vivre une journée de princesse. Un réseau d'amitié facilite l'organisation de rencontres avec des stars. Et parfois les Rois du Monde s'allie avec d'autres associations.

Une grande campagne démarrera le 10 décembre et se poursuivra jusqu'au 22 pour récolter des cadeaux qui seront redistribués au cours de goûters, et de "sapins de Noël". 

Avec cette galerie, l'association relève le nouveau défi de promouvoir de très jeunes talents qui, eux-mêmes, boostent d'autres jeunes afin qu'ils se lancent, m'a expliqué l'artiste Esther Lise Bentolila, bénévole de l'association. Le choix de Chiara comme première exposante est on ne peut plus évident. 
Tout est pour elle source d'inspiration. Son célèbre papa, Philippe, pâtissier de renommée internationale, mais aussi les sirènes nordiques qui chantaient pour attirer les marins.
Elle réfute le terme de Science fiction pour caractériser son univers mais admet qu'elle se situe dans le fantastique. Elle est très attirée par l'astronomie et j'ai remarqué combien elle s'accorderait avec un artiste comme Alex Alice que je lui conseille de découvrir, d'autant qu'elle est tenté par la bande dessinée.

Je n'ai pas de clichés pour démontrer sa capacité à suggérer l'abstraction (les oeuvres sous verre ne sont pas photographiables) alors il faudra vous déplacer ou guetter d'autres expositions. Il est impossible que celle-ci soit sans lendemain.
Elle travaille l'acrylique, l'aquarelle mais le crayon demeure son outil préféré et ses petits personnages sont attachants. Je comprends qu'elle songe à faire carrière dans l'illustration. Pour le moment elle poursuit ses études au lycée avant de s'orienter dans les Arts appliqués.
Quoiqu'elle décide, elle ira loin, c'est indéniable, et ses parents peuvent être fiers du travail déjà accompli.

Galerie Les Rois du Monde 23 rue Descombes 75017 Paris

Do not feel the trolls, un spectacle du festival Virtuel.hom[me] - 3e édition

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Le titre du spectacle, Do not feel the trolls, pourrait être traduit en français par Ne nourrissez pas les monstres mais je préférerais dire Ne coupez pas des morceaux de bois pour vous faire battre.

C’est la troisième année que le Théâtre Victor Hugo (de Bagneux-92) programme un festival consacré à la progression du virtuel, d’où l’intitulé Virtuel.hom[me] où la déformation du suffixe habituel com se veut optimiste.

Pourtant année après année, les réseaux sociaux sont, pour les femmes et les hommes de théâtre, une source d’inspiration de plus en plus sombre, comme s’ils se sentaient un devoir de lanceurs d’alerte. Le principe d’anonymat rendu possible sur les réseaux sociaux est-il compatible avec des relations dites humaines ?

Il faut bien entendu dénoncer le cyber-harcèlement, qui est totalement condamnable, ce spectacle en fait la preuve. Mais il démontre aussi combien l'addiction aux réseaux sociaux est une vraie pathologie, surtout quand on cherche par tous les moyens à s'attirer de la sympathie, ce qui peut créer de la jalousie et encourager des comportements de harcèlement. D'où mon interprétation du titre Ne coupez pas des morceaux de bois pour vous faire battre. Autrement dit allez de façon mesurée sur les réseaux sociaux.

Marie-Lise Fayet, la directrice du théâtre a fait confiance à une compagnie norvégienne de théâtre gestuel, le Krumple Theatre (qui était déjà venu à Bagneux il y a quelque temps), et dont le spectacle a été créé dans leur pays en janvier 2016 mais qui n’avait encore jamais été joué en France.

La soirée commence gentiment comme une conférence donnée par une jeune fille qui se présente comme étant bloggeuse. Elle s'appelle Lisa et vient à 14 ans de publier son autobiographie. Le personnage étonne, habillée de blanc et de noir avec des allures de chatte sortie droit d'un album de manga. Pendant les remerciements d’usage on perçoit qu’un spectateur ne se sent pas très bien, tousse beaucoup et finit assez vite à se singulariser par un comportement inadapté et hostile. L’adolescente conserve son calme avec maitrise mais peu à peu la situation dérape.
Lisa joue le rôle d'une australienne devenue star grâce au compte qu’elle avait ouvert sur Myspace (ancêtre de facebook) et qui a commencé à susciter des jalousies qui se sont traduites par des insultes qu’on qualifierait de gratuites : t’es moche. J’espère que tu vas crever en enfer.

On peut penser aux hurlements des conducteurs bien à l’abri dans leur voiture et se défoulant en plein embouteillage. Quand on s’adresse à quelqu’un qu’on ne connait pas en chair et en os l’être humain peut perdre son sang-froid et devenir odieux sans s’en rendre compte. C’est encore plus vrai sur Internet où l'anonymat permet cette forme de harcèlement se multiplie et s’appelle trolling.

La jeune fille a bien tenté de désamorcer le processus en posant une parole claire et en répondant aux menaces. Celles-ci n’ont fait qu’empirer. Sa maison a été vandalisée et elle a reçu des menaces de mort.

Elle explique comment les faits se sont enchainés. En quoi la solitude et le besoin de reconnaissance l'a menée à se forger une identité via les réseaux sociaux. Jusqu'à avoir 25 000 amis en trois mois, en acceptant toutes les demandes sans discernement. Des balles en forme de smiley et de coeur se déversent sur le plateau.
Le spectacle bascule alors dans une autre forme de théâtre, correspondant davantage à la spécialité du Krumple et c'est là que cela devient plus intéressant. La comédienne se mue en un robot mimant des tutoriels beauté.

L'amour qu'elle a jusque là suscité se mue en haine et en déchaînements de toutes sortes, j'allais écrire de toutes forces. C'est une histoire vraie qui a inspiré à la compagnie cette plongée dans le trolling. On peut penser qu'ils ont été inspirés aussi par l'univers des légendes scandinaves où les trolls sont des monstres ou des esprits vivant dans une forêt magique et symbolisant toutes nos pulsions.

Ils sont présents sur scène. On ne cherche pas à compter combien. Parce qu'on est entièrement mobilisés par ce qui se joue sur le plateau, entre langage visuel et expression corporelle, avec un sens aigu du tragique qui nous questionne sur nos nouveaux modes de vie.

Avec humour et poésie aussi et on reconnait la musique de la chanson que Line Renaud interprétait en 1953, Combien pour ce p'tit chien dans la vitrine ? mais dans sa version anglaise How Much Is That Doggie In The Window ...

Il y a de quoi s'inquiéter : Tinder, Snapchat, Instagram, Meetic, Twitter, Facebook... tous appellent l’amitié, l’amour, les échanges, les (faux) débats dans lesquels la possibilité d’anonymat est la règle commune et admise par tous les utilisateurs. Un principe peu compatible avec des relations dites humaines. Le festival nous donne dix jours pour y réfléchir ensemble. C'est un moment essentiel.
Do not feel the trolls
Par le Collectif Krumple
Jeudi 30 novembre, vendredi 1er décembre, samedi 2 décembre 20h30 et dimanche 3 décembre à 17h
Théâtre Victor Hugo
14 Avenue Victor Hugo, 92220 Bagneux - 01 46 63 10 54

Une journée chez ma mère de Charlotte de Turckheim

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Il y a quelques années Charlotte de Turckheim nous racontait déjà une journée chez sa mère. Ce qui est banal pour les Turckheim ne l'est pas du tout pour nous qui n'avons pas pour habitude d'enchainer au quotidien les catastrophes dans une atmosphère burlesque, délirante et hautement improbable.

20 ans ont passé. Elle y retourne. Rien n'est comme avant et pourtant on ressent la même impression.

La maison reste la même, peuplée de personnages exubérants, surprenants, exaspérants et touchants. Les problèmes n'ont pas évolué, la toiture menace toujours de s'effondrer, le frigidaire n'a toujours pas été réparé et les huissiers sont toujours derrière la porte.

Charlotte va devoir planquer les meubles dans une pièce et faire disparaître la porte... qui fera disparaître la pièce... qui fera disparaître les meubles qui sont cachés dedans. Elle qui comptait sur une bonne petite journée de repos va vite déchanter, à mesure qu'on se réjouit de ces mésaventures parce qu'elle sont source de rire pour nous.

Ce one-woman show donne la parole à une kyrielle de personnages. Je me suis demandé combien Charlotte en interprétait ... passant de l'un à l'autre au cours d'une même conversation avec une agilité phénoménale. Elle est en pyjama, en toute logique puisqu'elle est venue chez sa mère pour y faire une grasse matinée. Le décor est suggéré par le discours mais le cadre du cabaret est propice à faire germer notre imagination.
L'ambiance de la salle est douillette. on s'y sent comme dans une bonbonnière, attablés à des guéridons sous la lumière rosée de petits lumignons, veillés par des angelots accrochés à un plafond bleu nuit parsemé d'étoiles. Le rideau de scène carmin pailleté frémit et l'apparition de Charlotte soulève un tonnerre d'applaudissements.

Si la grand-mère part à la découverte du Paris de Mozart, enthousiaste à l'idée de suivre une conférence sur les passerelles entre l'Islam et la Chrétienté. Charlotte n'a rien envie de faire, peut-être à la rigueur lire un livre.

Impossible de se reposer dans cette maison où on entre comme dans un moulin. Les dialogues, concoctés par Charlotte avec la complicité de Bruno Gaccio, un ami de toujours, claquent sans répit, frôlant le surréalisme, mais toujours savoureux de drôlerie, et qui mettent une ambiance folle sur le plateau. Le texte original a été réécrit en lui insuffisant de la modernité sans lui faire perdre sa dimension comique et tendre à la fois parce qu'il était impossible de caricaturer sa famille sans amour.

La comédienne excelle dans les accents, portugais pour camper la femme de ménage, allemand pour caractériser le colocataire. C'est parfois juste un geste ou une mimique qui leur donne chair. Ils viendront tous saluer à la fin de cette journée éreintante.

Il fallait oser reprendre ce spectacle culte. Patrice Thibaud a aidé Charlotte à relever ce défi avec brio.

Une journée chez ma mère
Spectacle co-écrit par Charlotte de Turkheim et Bruno Gaccio
Interprété par Charlotte de Turkheim
Mis en scène par Patrice Thibaud
A partir du 10 novembre et jusqu'au 31 décembre 2017
Les vendredi et samedi à 20 heures, dimanche à 17 heures
Au cabaret de la Nouvelle Eve
25 rue Pierre Fontaine, 75009 Paris

Cuisiner le potimarron

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Il appartient à la famille des courges, nous tente souvent sur les marchés mais, ne sachant pas comment le préparer autrement qu’en (banale) soupe je renonce régulièrement à cet achat.

C’est parce que je suis allée dans une ferme que je me suis lancée. Et j’ai totalement changé d’avis. Le cuisiner n'est pas sorcier. Ce légume n’a qu’un défaut, il est difficile à trancher. Il faut un bon couteau et ne pas chercher à le couper sur plus de deux-trois centimètres d’épaisseur. Soyez prudents !

Une fois ce problème réglé (comme celui de parvenir à retirer l’épaisse peau qui, je crois est comestible mais pas agréable en bouche si on le mange cru) plusieurs possibilités très pratiques s’offrent à vous.

Il est très agréable cru, mais oui. On peut donc le râper, et l’associer à des carottes (qui sont plus juteuses donc qui apportent de la fraicheur) ou du céleri, ou les trois ensemble pour le consommer en vinaigrette. Ou faire une sauce jus d’orange-échalote-persil-huile d’olive. On peut aussi le trancher  à la mandoline … tout dépend de l’effet recherché.


On peut le braiser, en faisant revenir des tranches de deux centimètres d’épaisseur dans un peu de matière grasse puis en poursuivant la cuisson après avoir ajouté un peu d’eau dans la poêle. Il sera alors un des légumes présentés avec, par exemple, un sauté de volaille.
On peut encore le couper en petits dés, le faire cuire à la vapeur et l’ajouter à un riz blanc, avec également des raisins …. Beaucoup de combinaisons s’offrent à vous en dehors de la trop classique soupe, qui ne démérite pas pour autant qu'on l'agrémente, par exemple avec une tartine de Saint-Agur et un jambon noir de Bigorre AOC.
Et souvenez-vous qu'il existe aussi bien en version verte qu'orange. Avec peu de différence de goût. Le vert serait peut-être plus ferme, moins pâteux à la cuisson.

Smoke Rings, expérience de théâtre immersif au Cine XIII

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J'avais reçu un mail étrange de la Cie du Libre Acteur m'invitant à partager avec d'autres Camille une expérience de théâtre immersif : SMOKE RINGS. On m'indiquait que l’immersion débuterait précisément à 20h30 au ciné XIII, 1 avenue Junot - 75018 où on me donnait rendez-vous seulement à partir de 20h15.

Il était précisé que le dress code était noir et/ou blanc et qu'il était préférable que je porte des chaussures relativement confortables.

Je savais que le spectacle avait été conçu d'après Ring de Léonore Confino, que j'avais vu et apprécié au Théâtre du Petit Saint Martin il y a quatre ans, dans une mise en scène de l'auteure, avec Audrey Dana et Sami Bouajila. Il lui avait valu une nomination aux Molières en tant qu'auteur francophone.

Je connais le principe du théâtre immersif où les spectateurs  se trouvent au cœur de l’action scénique, avec une grande proximité avec les comédiens, étant parfois quasiment acteurs eux-mêmes.

J'aime beaucoup l'ambiance qui se dégage du Cine XII, totalement propice à ce type d'expérience avec son décor 1930, ses escaliers, son bar, la salle aux canapés profonds et sans doute des loges et un espace de répétition.

J'avais respecté le dress code sans prendre garde à m'équiper d'un petit sac pour y conserver appareil photo et carnet de notes. Je n'avais pas prévu qu'un vestiaire nous débarrasserait de tout le superflu. C'était bien la peine d'acquérir un manteau blanc (le noir le semblait triste) spécialement pour l'occasion !

J'ai donc vécu l'expérience en simple spectatrice, et au-delà puisque je me suis aperçue qu'il valait mieux venir à ce spectacle en petit groupe. La pièce interroge l’impermanence du sentiment amoureux, les soubresauts de la passion et parfois l’absurdité d’être à deux. Je déconseille de s'y rendre seul. L'expérience dure près de deux heures et on a envie de la partager avec des proches.

Chaque spectateur est considéré comme un invité à un mariage ou un baptême et reçoit une rose dont la couleur déterminera son parcours plonger dans les coins et recoins du Ciné XIII. Il y rencontrera des amants, des parents, des couples qui s’aiment à la folie, se maudissent, s’humilient, s’effleurent, se désirent, se lassent et se racontent.

L’immersion est tantôt contemplative tantôt participative avec une implication qui peut devenir sensorielle. Difficile d'en dire plus si on veut préserver le suspense indispensable dans ce genre d'expérience.

Sébastien Bonnabel a bâti une mise en scène qui tient compte des différents espace. Il a exigé des acteurs un jeu ultra-réaliste pour souligner l’absurdité de situations dramatiques, ce qui est très réussi.

Le spectateur va de surprise en surprise. Les comédiens ont une palette d'interprétations surprenantes au service des émotions. Le promesse de proposer au public une expérience de vie au-delà d’un spectacle sur le couple est tout à fait tenue.

Léonore Confino a écrit une trilogie : Ring, Building et Les Uns sur les autres, respectivement sur les thèmes du couple, du travail et de la famille entre 2009 et 2012. Les trois pièces sont publiées aux éditions l’Oeil du Prince.

La Cie du Libre Acteur a été fondée en 2012 sur une approche du jeu développée par Sébastien Bonnabel. La première création de la troupe a été "Autour de ma pierre, il ne fera pas nuit" de Fabrice Melquiot au Vingtième Théâtre, puis au Ciné XIII en 2015. La connaissance des lieux était une raison de plus pour y créer Smoke Rings qui est le troisième spectacle de la Cie.

Elle rassemble des comédiens issus du théâtre mais ayant développé une expérience parallèle dans le cinéma, la danse, le crique ou la musique. je citerais particulièrement Marie Combeau qui est aussi chanteuse, violoniste et contrebassiste. La musique, vous le constaterez, tient une place importante dans le spectacle et il faut saluer le travail de conception sonore de Camille Lockhart.

Smoke Rings
d’après Ring de Léonore Confino en collaboration avec l’auteure
Mise en scène de Sébastien Bonnabel
Avec Marie Combeau, Marine Dusehu, Marie Hennerez, Alexia Saurat, Eric Chantelauze, Philippe de Monts et Stéphane Giletta
Tous les dimanches à 20h30 du 1er octobre au 17 décembre 2017
Puis tous les lundis à 20h du 22 janvier au 26 mars 2018
Au CINÉ XIII
1 avenue Junot 75018 Paris - 01 42 54 15 12 - www.cine13-theatre.com
En raison des déplacements par les escaliers le spectacle est déconseillé aux personnes à mobilité réduite.

La brasserie Bofinger honore Saint Nicolas

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Cela va devenir le premier rendez-vous annonçant les fêtes de fin d'année. Pour la deuxième fois la Brasserie Bofinger y célèbre la Saint-Nicolas qui est si essentielle en Alsace-Lorraine.

On commencera par une flute de Crémant d'Alsace sur un sirop de mirabelle Laroppe (54200 Bruley) dans lequel une mirabelle (dénoyautée s'il vous plait) roulera sous l'effet des bulles.

Si nous étions plusieurs siècles en arrière, nous aurions comme le faisaient les Alsaciens venus s’installer dans le quartier Saint-Antoine afin de travailler dans la menuiserie et l’ébénisterie, apporté notre choppe pour consommer de la bière, comme le voulait la tradition à l’époque.

Fondée en 1864 par l’Alsacien Frédéric Bofinger la brasserie a marqué l’histoire de la capitale. C’est en effet dans cet établissement qu'a été installée la première pompe à pression de la ville. La boisson titre alors entre 18 et 25°. La bière de Noël est servie ce 6 décembre, évidemment à la pression, dans les verres adéquats et proposée avec des bretzels.

Selon une histoire locale, le bretzel serait né en 1477 d'un ultimatum imposé par le roi à un boulanger de Bouxwiller d'inventer un pain "au travers duquel le soleil brillerait trois fois". Sa femme priant les bras posés sur sa poitrine en forme de croix lui donna l'idée de croiser les deux extrémités d'un ruban de pâte, formant ainsi trois trous, à travers lesquels le soleil pouvait briller trois fois.
Selon une autre histoire alsacienne locale, la forme spécifique du bretzel tiendrait de ses origines étymologique car en alsacien le mot signifie "le temps de repos". La forme du bretzel représente en effet la position des bras croisés lorsque sonne l'heure de la pause.
Il est naturel que l’enseigne représente une petite Alsacienne avec un kouglof et un petit Alsacien avec sa chope de bière et un bretzel courant à la brasserie.

Ce n'est pas la seule spécialité de la maison (il faut compter aussi avec les huîtres et les fruits de mer) mais la choucroute est tout de même le plat emblématique alsacien par excellence. Alors plusieurs énormes poêlons avaient été préparés.
La plus surprenante était crue, avec une vinaigrette au cumin, et composée de poissons fumés. C'est par elle qu'il fallait commencer la dégustation.
Ceux qui voulaient rester dans une note marine pouvaient poursuivre avec la Choucroute de la mer, un assemblage de haddock, saumon d’Écosse, bar (qui a remplacé la lotte), langoustine, pommes à l’anglaise, proposée avec un beurre au raifort.

Plus originale, la Choucroute d'agneau, qui a été imaginée l'année dernière à Pâques, et qui est dévoilée par Frédéric Tabey, le directeur de l'établissement.
Ma préférée reste la Choucroute de canard aromatisée à la truffe  (ci-dessous)...
... alors que la Choucroute Bofinger (dite classique) demeure une valeur sûre avec jarret de porc demi-sel, saucisse blanche, saucisse au cumin, saucisse de Strasbourg, poitrine de porc fumé, échine, et bien entendu des pommes à l’anglaise.

Le chef Stéphane Loaec m'apprend que chaque poêlon renferme 10 kilos de chou, alors que d'habitude ce légume est cuisiné par 50 kilos, ce qui correspond à un volume hebdomadaire d'environ 600 kilos.
Il faut pour la réussir, compter 2 heures de cuisson en cocote fermée. Elle est bien meilleure si on ajoute des oignons confits au four. Quant au secret de la tisane dans laquelle cuit le chou il y a comme ingrédients de la coriandre, de l'ail et du cumin. Le jus de cuisson de la choucroute est conservé pour y cuire le jarret.

D'autres plats sont réputés dans le restaurant comme le Baeckeoffe qui est réalisé non pas avec des viandes comme le veut la coutume mais avec des poissons (Bar, saumon d’Écosse et haddock). Le traditionnel Munster fermier de la maison Siffert-Frech est un autre incontournable et comme dessert le Strudel aux pommes et raisins qui fit dans la salle du premier étage une entrée en feu d'artifices.
Cette fois, c'est un verre du très parfumé Gewurtztraminer Vendanges Tardives cuvée Christine 2013 des domaines Schlumberger qui s'impose, en toute modération cependant.

Tout au long de la soirée nous avons admiré le cadre ce cet établissement, établi en 1864, et qui a conservé son authentique décoration Belle Époque, ses marqueteries, sa splendide verrière, ses banquettes de cuir et cuivres, tout un ensemble qui en fait l'un des grands classiques du quartier Saint-Antoine/Bastille.
La salle de la coupole a été érigée en 1919 sur une cour aveugle, qui a longtemps servi d’endroit de stockage pour du charbon. Une coupole ovale a été installée pour lui donner de la lumière et la décorer. Elle est ornée de motifs floraux et a été réalisée par les peintres-verriers Gaston Néret (verrier d’Hector Guimard) et Royé. Au centre de la salle, une desserte rehaussée d’une glycine (qui a remplacé la cigogne initiale) sépare les 32 tables les plus prisées de l’établissement. Autour de la salle, les murs sont ornés de frises, de médaillons sur toile et de peintures représentant les villes de vin. L'escalier à large révolution permet une vue panoramique sur cette grande salle. Sa très belle rampe en fer battu est décorée de motifs végétaux.

Deux nouvelles salles prennent alors la place d’une crémerie et d’une boulangerie dont les piliers demeurent visibles. Entre 1919 et 1921, l’architecte Legay, le décorateur Mitgen et les maîtres verriers Néret et Royé donnent à Bofinger le faste qui lui vaudront le surnom de "plus belle brasserie de Paris".

La Seconde Guerre Mondiale porte un coup d’arrêt au foisonnement de Bofinger. Une inscription d'un des vitraux de l'étage est modifiée : Vive la France devient Vive le vin. Il a ainsi pu être conservé. Et on peut toujours admirer cet autre vitrail de Gambrinus assis sur son tonneau signé de Néret.
Lorsqu’en 1968, Éric de Rothschild et Isidore Urtizverea rachètent la brasserie, les figures du Tout Paris de la politique et de l’art se pressent à nouveau chez Bofinger, où François Mitterrand viendra même célébrer son entrée à l’Élysée.

Le 13 mars 1989, la brasserie est inscrite à l’Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques. Raison supplémentaire pour y venir ! Le cadre est superbe et les assiettes sont bien garnies.

Nous sommes repartis avec un sac évoquant les personnages dessinés par Hansi et un kouglof du maitre en la matière, Stéphane Vandermeersch, chez qui j'ai fait un reportage il y a quelques mois.
Brasserie Bofinger
Cuisine française et spécialités alsaciennes
5-7 Rue de la Bastille, 75004 Paris - 01 42 72 87 82
Horaires : 12:00–15:00, 18:30–00:00
Vente à emporter possible

Retour d'Islande, exposition du peintre et graveur Bernard Alligand à Chatenay-Malabry (92)

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Le Pavillon des Arts de la ville de Chatenay-Malabry (92) invite le public à découvrir une terre de glace et de feu auréolée de mystère que Bernard Alligand a explorée au cours de plusieurs voyages pendant plus de quinze ans.

Il est revenu d'Islande avec de précieuses récoltes de terres,  de sables volcaniques noirs et nacrés, d’ocres et de boues sulfuriques qu’il associe selon l’inspiration que ce pays suscite en lui.

Ses œuvres qui ne sont ni abstraites ni figuratives, tiennent de la peinture et de la sculpture. Elles nous questionnent. On pourra y voir des paysages, des plages imaginaires, des ciels tourmentés, des aurores boréales, l’évocation du cosmos ou d’une puissance surgie de la féerie.
Elles dégagent une force qui déploie une énergie étonnante. Pour nous qui vivons dans un espace verdoyant, ces tableaux essentiellement en nuances de noirs, de blancs et d’ocres laissent entrevoir des paysages sans cesse remodelés dans des contrastes inhabituels à nos yeux.

Les forces de la nature appartiennent à notre vie et forgent notre caractère a rappelé Kristjàn Andri Stefànsson, ambassadeur d’Islande, le matin du vernissage avant de faire une lecture de poèmes de Sigurður Pálsson, né le 30 juillet 1948 à Skinnastadur et mort le 19 septembre 2017 à Reykjavik, un poète islandais qui a vécu longtemps en France. Ses poèmes sont conçus suivant un schéma proche de l’Haïku. La langue islandaise est déroutante pour nos oreilles et nous avons apprécié que Bernard nous les offre auparavant en français.
Avec cette troisième exposition, Chatenay confirme son exigence de soumettre les Chatenaisiens à des œuvres de grande qualité et néanmoins accessible avec une médiation. Il n’y avait pas d’enfant le jour du vernissage. J’aurais aimé entendre leurs avis.
Une bibliothèque nomade est proposée pendant toute la période de l’exposition avec une bibliographie détaillée. De quoi avoir envie ensuite d’entreprendre un grand voyage dans ce pays que Voltaire pensait aride et sans intérêt mais qui, peu de gens le savent, inspira à Jules Verne son Voyage au centre de la terre et à Pierre Loti le décor de Pêcheur d’Islande.
Bernard Alligand est né en 1953 à Angers. Il s’initie à l’art graphique puis au modelage. Après avoir exposé dans les Pays de Loire et obtenu plusieurs prix, il s’installe sur la Côte d’Azur en 1982.

C'est à cette époque qu'il vit un choc artistique en visitant les grottes de Lascaux qui déterminera son rapport à la matière. En 1986, il réalise ses premières gravures, puis, grâce à sa rencontre avec Henri Goetz, s’initie à la gravure au Carborundum. Artiste-peintre et graveur d´expression abstraite, Bernard Alligand a toujours travaillé sur la matière, non seulement pour tirer de celle-ci la substance de son œuvre, mais aussi pour savoir quelles possibilités elle pouvait lui offrir. Il peut aussi utiliser de la pâte à papier comme pour les trois extraits d'aquagravures ci-dessous.
Il a voyagé dans de nombreux pays : Angleterre, Espagne, Allemagne, Grèce, Egypte, Japon, Laos, Canada, Italie, Maroc ... parce que, comme il le dit : voyager, c'est découvrir des sensations, des odeurs, pour nourrir sa création.
Il installa son atelier à Vence, dans les Alpes-Maritimes mais c'est désormais à Paris qu'il travaille depuis 1993 à ses retours de voyage. Depuis 2002 l'Islande est sa source d'inspiration privilégiée après un séjour dans ce pays d'où il est revenu avec des minéraux récoltés au fil de son périple et depuis il en ramène à chacun de ses séjours. Il a aussi illustré de nombreux livres d'artistes.
Ce sont une trentaine d’oeuvres, imaginées avec des matériaux prélevés sur place et à partir des impressionnants paysages islandais, qui sont ici exposées, comme le chant de Thor (ci-dessus) qui est la seule que j'ai photographiée dans son entièreté.
Il m'a semblé pour les autres que quelques gros plans seraient plus incitatifs à vous déplacer.
Retour d'Islande 
A partir du mercredi 29 novembre 2017 et jusqu'au samedi 20 janvier 2018
Au Pavillon des Arts et du Patrimoine
98 rue Jean-Longuet
92290 Chatenay-Malabry
Le mardi de 10 h à 12h30 et de 16 h à 18 h, le mercredi de 10 h à 12h30 et de 14 h à 18 h, jeudi de 10 h à 18 h, le vendredi de 14 h à 18 h, le samedi de 10 h à 12h30 et de 14 h à 18 h.
Tél. : 01 47 02 75 22

Kastoori, délicieux restaurant indien et pakistanais

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Il n'y a pas que le passage Brady pour manger indien. Kastoori est un restaurant qui propose une délicieuse cuisine réalisée par des cuisiniers indiens et pakistanais. Il existe depuis presque vingt ans et je l'ai découvert à la faveur d'une relâche du théâtre La Bruyère qui a brutalement creusé un trou dans mon emploi du temps. Et je ne le regrette pas.

C'est à quelques mètres du théâtre, sur la place Gustave Toudouze.

S'il y a une chose que vous ne trouverez pas à la carte c'est l'alcool parce que le personnel respecte ses convictions religieuses. Mais il ne les impose pas. Vous pouvez très bien, si cette boisson vous est indispensable, venir avec votre bouteille que vous pourrez déguster à loisir. On vous la débouchera sans vous faire la leçon. C'est ce qu'on appelle un restaurant BYO (Bring Your Own ... bouteille de vin). Et comme c'est souvent ce qui pèse sur la note, c'est un point favorable.

Franchement ce serait tout de même dommage de vous priver d'un lassi ou de leurs cocktails de fruits frais comme le Goa qui est un mélange d'ananas, mangue, papaye et kiwi.

Autre spécialité, le Thali qui est un grand plateau composant un repas complet pour 17 € (le soir, mais il est à 10 € le midi). Sa composition peut varier. A titre indicatif il était ce soir composé d'un poulet Korma au lait de coco et cannelle, de concombre au yaourt, d'une galette de pomme de terre, d'épinards au curry et fromage, d'un riz basmati au safran…

Le prix du menu est constant, quelle que soit l'heure, et il est raisonnable. Vous pourrez par exemple hésiter pour commencer entre le classique (selon moi) Raïta, du yaourt avec des concombres et des tomates et un plat de Kaleji, du Foie d'Agneau servi chaud dans une sauce Curry qui m'a agréablement surprise. A moins de préférer une brochette de viande hachée, grillée dans un four spécial en terre.
Sept spécialités sont à choisir comme plat. On trouve parmi elles le Poulet spécial Chicken Kastoori : Poulet, Yaourt, Coriandre, Pistaches, Amandes, Noix de Cajou, que l'on apporte dans un poêlon de cuivre et qui sera maintenu au chaud pendant le repas. La sauce est sublime, épicée sans trop l'être, et je ne regrette pas le pain Chapati qui me permet de ne pas en perdre une goutte. Il n'y a sans doute que le Karahi Chicken qui soit très épicé, mais c'est mentionné sur la carte.
Mais j'aurais pu opter pour un Chicken Tandoori, (une spécialité du chef) deux cuisses de poulet cuites sur un four de pierre en feu, qui arrivent dans la couleur rouge habituelle du mélange d'épices utilisés (curry, gingembre, cumin, piment de Cayenne). On a la possibilité de demander en accompagnement un riz basmati au safran, un Chapati ou un Cheese nan, spécialité qui n'est pas indienne puisqu'elle a été inventée par des européens mais qui a fini par devenir emblématique de cette cuisine.
J'ai lu plusieurs critiques assez sévères relatant un service un peu bâclé, et pas toujours très agréable. Il n'en fut rien ce soir puisque au contraire, le serveur accepta qu'on prenne un autre pain (un Garlic Nan ou pain à l'ail) que celui qui était au menu et qu'on nous a servi au delà de l'heure de fermeture.
Toutes les recettes traditionnelles sont déclinées au poulet, à l'agneau, au poisson ou aux crevettes. sans oublier les végétariens.
En dessert j'ai découvert une délicieuse combinaison de glace et de fruits confits.

Nous sommes en hiver et nous avons apprécié le confort de la banquette dans une salle qui ne renie pas les origines du patron sans verser dans le kitsch souvent habituel dans ce type de restaurant. la cuisine est ouverte et on peut apercevoir le célèbre four cylindrique qui permet la cuisson si particulière des pains.

L'été, la terrasse doit être prise d'assaut, midi et soir, pour un merveilleux cocktail fruité et le repas ensuite. Une bonne adresse à retenir.

Kastoori, 4 place Gustave Toudouze, 75009 Paris
Ouvert tous les jours de 12h à 14h30 et de 19h à 23h30. Livraison possible à domicile dans plusieurs arrondissements. Menu unique à 17 €. Carte : 25 € environ. Formule du midi : 10 €.

YOUPI c'est reparti ! à la Nouvelle Ève

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Ce ne sera joué que trois lundis. Il ne fallait pas louper ces représentations exceptionnelles à plus d'un titre.

YOUPI c'est reparti ! est formidable. J'ai adoré ce spectacle parce que c'est du vrai music-hall, qui tout en respectant les codes du genre, n'est pas surchargé en strass, plumes et escarpins.

Il y en a mais ce sont des accessoires au service de vrais numéros, menés par des artistes hors pairs, sachant chanter, danser et jouer la comédie.

On n'est pas sur la scène du Moulin-Rouge, (un quasi voisin) mais dans l'ambiance feutrée d'un cabaret, comme je l'ai décrite à propos du billet consacré à Une journée chez ma mère.

L'endroit est propice à la nostalgie : tu te souviens quand on venait danser ici ? interroge ma voisine à ses amis, heureux d'évoquer le passé dans une salle qui est en pleine effervescence.

L'ambiance est décalée et on aime ça. Aucun des artistes ne se prend au sérieux. Et pourtant leurs numéros sont aux petits oignons. Avant de les applaudir c'est dans la salle que ça se passe, où l'ouvreuse vend des pâtés avec un naturel confondant. Elle jure qu'elle le fait depuis 40 ans, 18 mois et 2 jours; on la croit bien sur.

On croit à tout ce soir. Caroline Roëlands lance la soirée avec un savoir-faire qui rappelle Liza Minelli. Quel bonheur ! C'est elle qui signe la mise en scène. Bravo !
Charlène Duval est une spectaculaire meneuse de revue. Elle commence par une réinterprétation de la Sainte Vierge entourée de boys en guise de Rois Mages qui est un pur bonheur de dérision. On la retrouvera chaque fois avec un immense plaisir. En robe longue comme en tutu et plumes, elle est tout bonnement formidable.
On s'amuse de réécouter l'Amérique de Sheila, Adio amor ... Et que dire de Madame Raymonde (Denis d'Arcangelo) en étoile du Berger ? Sa gouaille est inénarrable.

Les numéros s'enchainent. Difficile de dire lequel on préfère. Ils sont tous différents. Tous réussis. Même Gwyneth, la poule connait son rôle par coeur.

J'accorde une mention spéciale tout de même à la prestation de l'extraordinaire Patrick Laviosa qui yodelle à qui mieux mieux.

Il faut tous les citer : Jacques Verzier, Benoît Romain, Sébastien Mesnil, Alexandre Bonstein, Christine Bonnard, Pascal Mary, François Beretta, Fred Jean-Baptiste, Mathieu Morel, Tiago Do Nascimento, Régina de Chatonville et Monaline Gilloux.

Ne croyez pas que j'ai oublié Nicole Croisille. Elle ne fait pas de la figuration et descend le fameux escalier. On rêve d'avoir d'aussi belles jambes que celles qu'elle croise encore sur l'air de Fever. Cette chanson créée en 1956 a été chantée par Little Willie John, qui en vendit plus d'un million d'exemplaires. La version la plus célèbre date de 1958, interprétée par Peggy Lee, mais Nicole l'interprète tout de même avec talent et passion depuis au moins 1987 avec l'album Jazzille.

Elle interprète trois chansons dont Enough is Enough (Assez c'est assez) digne de Donna Summer et un Youpi c'est reparti ! fort joyeux. Je l'avais beaucoup appréciée cet été dans Night with Satie. On est toujours heureux de la retrouver dans ce type de spectacle.
La soirée se poursuit avec des jeux de plume, et des numéros chorégraphiés avec souplesse, tour de force et musicalité jusqu'au final évidemment offenbachien.

La soirée se termine en nous laissant un goût de fêtes (de fin d'année) avant l'heure et ça fait du bien. Vive le music-hall ! Surveiller les programmes. Il partira mais il reviendra c'est certain.
YOUPI c'est reparti !
Les lundis 4, 11 et 18 décembre 2017 à 20 h 30
A la Nouvelle Ève
25 rue fontaine 75009 Paris M° Blanche
Réservation : 01 48 65 97 90

Concert de Maria Fausta Rizzo

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Etre invité(e) à un concert de "lancement" d'un disque, c'est toujours l'assurance de vivre un moment exceptionnel. Je l'ai maintes fois constaté. Celui que mariaFausta a préparé en est la preuve.

Son premier album solo, Million Faces est disponible sur tous les magasins de musique en ligne, par exemple Itunes. C'est un voyage à la recherche d’un langage qui explore la Pop dans ses nuances Jazz, Rock, Blues.

Violoniste classique diplômée avec mention auprès du Conservatoire National de Musique Corelli de Messine, Maria Fausta Rizzo, de son vrai nom, a collaboré 12 ans avec les frères Melo et Pippo Mafali. Elle a poursuivi sa formation en France au Centre des Musiques de Didier Lockwood, d'où elle est sortie avec un diplôme de musique jazz.

Je l'avais découverte dans cette même salle du Théâtre de Nesle où elle interprétait en live la musique de la pièce Doll is mine. C'était une révélation. J'avais hâte de la revoir sur scène et cette soirée a comblé les attentes de tout le public ... jusqu'à une petite fille (la sienne) de moins de trois ans qui a joué les choristes impromptues avec un à propos déroutant et spontané. C'est sans doute comme cela que naissent les vocations.

L'acoustique de la salle correspond parfaitement à ce qu'on peut espérer. Et quand on a la chance de voir en duo cette excellente violoniste avec l'extraordinaire Didier Lockwood vous pensez bien qu'on est proche des dieux. No picture about me est un pur moment de bonheur. Ils ne sont que tous les deux et la présence d'autres musiciens n'est alors pas nécessaire.
Elle se met ensuite au piano, qui est son deuxième instrument de prédilection, pour l'accompagner en chantant d'une voix qui semble "violoniser". Aucun doute possible : mariaFausta est (aussi) une rockeuse. Elle chante en anglais depuis son enfance, pour une question de sonorités. L’anglais correspond parfaitement à sa façon de chanter, au timbre de sa voix, à ses chansons, même si elle ne renie pas sa langue natale, l'italien, ni le français qu'elle parle à la perfection.
Le jazzman évoque les moments passés avec elle dans son école de Dammarie-les-Lys. Il avait tout de suite perçu ce qu'elle avait de différent de tous les autres : sa capacité à jouer et à chanter en même temps, d'une manière incarnée, lui faisant penser à Janis Joplin. Il salue tout autant sa compétence en temps que compositrice.

Le troisième morceau se situe dans une tonalité radicalement particulière, faisant davantage penser à une berceuse. Ces deux-là s'entendent à merveille malgré une manière de jouer très différente, et c'est ce que le public apprécie ce soir. mariaFausta n'utilise pas toujours l'archet et semble exploiter le violon de diverses manières.

Le grand musicien lui fait l'honneur et le plaisir de l'accompagner pour le premier morceau de l'album, Look over. mariaFausta l'a voulu comme une déclaration d’amour à la beauté. On vit dans un monde peuplé de mythes et de héros de légende... J’ai arraché tous les posters des murs de ma chambre, c’est ainsi que cette chanson est née. Se sentir tout simplement une partie de quelque chose de plus grand... quelque chose de parfait. La conscience de tout ce que je reçois au contact de la nature m’amène à dépasser mes peurs. Je veux regarder plus loin... au-delà de moi-même.

Le plaisir est partagé et rare car il est différent de ce qu'on pourra entendre en écoutant le CD. Kevin Reveyrand est à la basse et Tiss Rodriguezà la batterie.

Hélas Didier s'en va mais un autre musicien d'exception, Olivier Ker Ourio, apparait avec son harmonica pour Rare Woman (piste 4), une chanson qu'elle a écrite lorsqu'elle n'avait que 17 ans. L'album a joui de la collaboration d’artistes reconnus au niveau international : Franco Mezzena Violoniste classique italien, Olivier Ker Ourio, harmoniciste jazz français, Didier Del Aguila bassiste flamenco français. Il se veut comme un voyage entre différents styles à la recherche d’un langage qui explore la Pop dans ses nuances Jazz, Rock, Blues ...
Ce sera ensuite un texte qu'elle a composé un soir, juste avant de rentrer en Sicile pour se marier, Love Song (piste 7), dédiée naturellement à son mari Giuseppe, et qu'elle la chante seule au piano. Je voudrais construire jour après jour notre vie ensemble nous confie la jeune femme.

Suivra Legend (piste 3) qui s'adresse à ceux qui sont prêts à faire le grand saut. Puis In the room (piste 11) dont les paroles pourraient être diversement interprétées : I was in the middle of the night / And her comes the sense of my life (...) Should I share my silence ... La tonalité est clairement blues et la petite fille aime visiblement l'harmonica qui l'incite à gazouiller.
L'harmonica n'a plus sa place dans la musique pour Rememberin'me (piste 8) qui témoigne par contre d'une part plus sombre de sa personnalité. Le batteur effectue un très bel accompagnement pour cette chanson terriblement rock.

mariaFausta a mis trois ans pour réaliser cet album et on comprend qu'il a fallu ce temps pour explorer plusieurs facettes, et justifier le titre de l'album, Million Faces. Elle est aussi chef d'orchestre et a commencé à travailler en tant que compositrice pour les chaînes du groupe RTI Mediaset. Ensuite elle a collaboré, en jouant et en composant, avec beaucoup de formations : du duo, avec la Dj Helen Brown, au trio, avec les frères Mafali, au quartet, pour un tribut à Astor Piazzolla et jusqu’à des Rock Bands. En tant que chanteuse et violoniste soliste, elle travaille avec de nombreux orchestres. En France, où elle a vécu quelques années, elle forme un duo avec la pianiste Jessica Rock et collabore avec plusieurs formations jazz/blues. Elle n’a jamais abandonné la musique classique et continue à enseigner le violon et à se produire avec des ensembles orchestraux. D’ailleurs, elle vient de rentrer d’une tournée chinoise.

Olivier Ker Ourio revient et nous offre un très beau solo auquel le piano lui répondra.
Baby Shine (piste 6) est l'occasion d'effectuer des percussions sur le piano alors que le percussionniste fait résonner une caisse comme un djembe. Très différent de l'interprétation que l'on peut entendre sur le disque on perçoit malgré tout une voix qui fait penser à Alice Merton quand elle chante No roots, grand succès actuel.
Ce n'est pas déjà fini ? Les saluts le laissent entendre mais une dernière chanson nous ravit avant qu'on se quitte dans une ambiance blues. mariaFausta est une artiste éclectique. Il est certain qu'on la reverra bientôt sur une scène, de théâtre ou de concert, ou les deux évidemment. Ces millions de visages sont les siens et correspondent à tout ce qui la fait vibrer, et nous avec. Son timbre est particulier et complexe. Sa manière de jouer est très personnelle, d'une ampleur et d'une implication qui fait aussi penser à Véronique Sanson bien qu'elles n'aient pas le même registre. Entre soul et rock cet album est envoutant, délicat et complexe.
Million Faces, de mariaFausta, dans les bacs le 12 Novembre 2017
Musiques, textes et arrangements de Maria Fausta Rizzo, chanteuse-compositrice italienne 
Le dimanche 10 décembre 2017 à 21h30
Au Théâtre de Nesle
8, rue de Nesle, 75 006 Paris
Avec Tiss Rodriguez à la batterie, Kevin Reveyrand à la basse
Et la participation du violoniste de jazz Didier Lockwood et de l'harmoniciste jazz français Olivier Ker Ourio.

Krooner on the rocks

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Cela fait trois ans que Krooner on the rocks fait salle comble au Petit Gymnase. Et le succès est mérité. Le public est dans l'ambiance dès son installation dans la salle. On peut reconnaitre la voix chaude de Lucy HarrisonBesame mucho accompagnée au piano par Raphaël Bancou, caché derrière un pan de mur.

On comprend que le spectacle qu'elle a conçu et mis en scène sera très musical. C'est à une sorte de guerre que vont se livrer une femme, Lucy et un homme (Fabrice Banderra) sur tous les plans. Car tout les oppose, le look, leurs choix musicaux et leurs idoles. Elle, tendance bikeuse, est fan d'ACDC, lui, admiratif d'Ava Gardner, ne jure que par Sinatra.

Ils sont voisins de palier et ne se supportent pas, estimant que la musique que chacun écoute n'est que du bruit à leurs oreilles. Tous deux célibataires se sont inscrits sur un site de rencontres et nous les découvrons en train de se préparer pour une soirée mémorable, ignorant qu'ils ont rendez-vous ensemble. Le choc sera terrible mais qui sait, peut-être arriveront-ils à s'entendre, ... et plus si affinités.

Tout est plaisant dans ce spectacle. Les dialogues (aux petits oignons) comme les reprises de grands standard, du rock par Lucy et du jazz par Fabrice. Le pianiste passe d'un registre à l'autre avec une facilité déconcertante. Il a beau être en retrait il joue lui aussi à la moindre occasion, opinant de la tête ou levant un sourcil désapprobateur autant que nécessaire. Et quand il se lance dans un numéro de beat boxing on applaudit, ... forcément. Il aura bien raison de venir saluer plus tard avec des ailes dans le dos.

La scénographie est habilement conçue en nous permettant de partager l'intimité de chacun des personnages. On la découvre en turban. Il est en chaussettes.
Well I heard there was a secret chord ... Dès que Lucy entonne les premières paroles de Hallelujah (une chanson créée par Leonard Cohen et tant de fois reprise) on sait qu'on va passer un moment mémorable. Sa voix est superbe. Francis est en alerte et rebondira sur le mot heaven en chantant à sa chaussure. Tous deux sont également à l'aise en anglais.

Elle parle avec son cher papa. Il converse avec sa chère maman. Il lui confie que no way la voisine, pas son style. Aucun doute pour nous que le site des Célibataires Anonymes sera un site de rencontres qui va les ranimer. Il s'imagine qu'il a rendez-vous avec Audrey Hepburn. Elle sait qu'on peut pas toutes rivaliser avec Kate Moss. Lucy raille en prétendant résister là la tentation de la salle de gym et en faisant l'apologie de la rondeur. On attend le choc même si la musique de Satie semble les mettre d'accord.
En attendant on savoure Stay with me d'autant qu'il danse très bien. Elle aussi d'ailleurs le démontrera à plusieurs reprises.
Je ne sais pas quel moment j'ai préféré. Le spectacle est presque un récital. Lucy dégage souvent la puissance de Tina Turner. Fabrice a la douceur de Paul Anka et interprète merveilleusement les standards de Broadway. Et la chanson de Kurt Weill, en allemand bien sûr est également réussie, comme le seront Cocaine ou Ma gueule (petit hommage à Johnny en passant).
Ils sont touchants aussi quand après une approche orageuse, ils s'aperçoivent qu'ils ont des points commun. C'est Lou Reed qui les rapproche avec les paroles de Walk On The Wild Side qu'ils interprètent conjointement.

C'est la superbe chanson de Nina Simone (1965) qui va les mettre d'accord :
It's a new dawn
It's a new day
It's a new life for me
Ooh and I'm feelin' good
C'est une nouvelle aube
C'est un nouveau jour
C'est une nouvelle vie pour moi
Ooh et je me sens bien.
Ils termineront comme Ike & Tina Turner avec Proud Mary et on leur souhaitera tout le bonheur du monde en reprenant avec eux We're rolling, rolling / Rolling on the river.

Je recommande ce spectacle où rock'n'roll, humour et jazz font si bon ménage. On chante et on rit beaucoup ! C'est vivifiant. Et le message sous-jacent démontrant que des univers diamétralement opposés peuvent cohabiter est plutôt réjouissant.
Krooner on the Rocks
Jusqu'au 27 décembre 2017
Les mercredis à 20h00
Théatre du Gymnase
38 Boulevard de Bonne Nouvelle
75010 Paris
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